Le spectacle, c'est un monde de loups. C'est pire qu'un monde de loups. C'est un monde où les loups ne vous rappellent pas au téléphone.

Woody Allen

Flashback

-M’man?
-Oui mon poussin?
-Quand est-ce que papa va rentrer?
-Très bientôt.
-Combien de dodos hein?
-14 dodos mon chou.
-C’est long 14 dodos. J’veux qu’il vienne tout de suite, bon! Rétorqua Connor, la mine boudeuse et les bras croisés.
-Tu sais bien qu’il viendrait plutôt s’il le pouvait, mais ton père doit rencontrer des gens importants pour le travail. Aller, met ton manteau. Il faut que nous allions voir grand-maman.
-Dis, elle aura fait des caramels pour moi?
-Tu sais bien que oui, mon chéri.
-Youpi!

Connor prit son manteau et l’enfila en quatrième vitesse à la seule mention des caramels. Il empoigna aussi son ourson qu’il traînait absolument partout. C’était un cadeau que son cher papa lui avait acheté lorsque sa mère et lui étaient allés le rejoindre à Londres, pendant un de ses voyages d’affaire. Pour Connor, son père, c’était le meilleur du monde parce qu’il lui achetait tout le temps des présents quand il partait longtemps, une malheureuse technique que nombreux parents faisaient pour compenser leurs longues absences, mais ce concept échappait encore à Connor vu son âge. Sa chambre était pleine de jouets et le petit garçon aimait bien parader avec lorsqu’il allait voir des copains. Dès que son père lui ramenait un présent, Connor oubliait que son paternel était parti longtemps et il retrouvait instantanément le sourire. C’est que la famille O’Brien était riche, très riche. Ils habitaient le quartier de Manhattan, dans une énorme maison. Sa mère était femme au foyer, lui permettant ainsi de s’occuper de son unique et très cher fils. Connor était le portait typique de l’enfant gâté ; il geignait quand il n’avait pas ce qu’il voulait, n’acceptait pas qu’on le réprimande et aimait déjà se prendre pour un petit roi à qui il lui était permit de tout faire. Il ne savait pas combien il demandait de l’énergie à sa pauvre mère, mais sa patience avait souvent raison de Connor et elle était bien la seule que le petit écoutait.

Arrivé dehors, Connor couru dans la neige, pendant que sa mère lui disait de faire attention, apeuré à l’idée qu’il lui arrive quelque chose. New-York était une grande ville et l’idée de perdre son seul et unique enfant l’angoissait. Elle rattrapa Connor et lui empoigna le bras avant qu’il ne traverse la rue. Pendant qu’ils marchaient vers la demeure de grand-mère, Connor leva la tête vers le ciel et ouvrit la bouche pour avaler quelques flocons, en riant. Après quoi, le petit garçon jeta un coup d’œil à sa mère, mais celle-ci fixait le sol, la mine triste. Il se souvint de cette nuit, lorsqu’il avait cru l’entendre pleurer. Trop jeune encore pour comprendre les peines d’adultes, il pouvait tout de même comprendre que sa maman n’allait pas très bien, car il ne l’avait pas vu sourire. Il alla la rejoindre et lui prit la main, la regardant avec inquiétude :

-M’man, pourquoi t’es triste?

Madame O’Brien l’avait regardé, surprise par la question. Parfois, les enfants étaient fort directes. Mal à l’aise, elle ne sut quoi dire, mais elle s’arrêta, pour s’agenouiller en face de son fils et lui caresser sa jolie chevelure bouclée. Elle avait affiché un faible sourire et lui avait expliqué que le tout allait s’arranger. Connor ne comprenait pas ce qu’il se passait, mais la dernière fois, il avait entendu ses parents se crier dessus et il y avait eu une gifle sonore. Connor s’accrocha à son cou, car il n’aimait pas beaucoup voir sa maman dans cet état. Sa mère lui caressa le dos, se disant que son fils était sans nul doute la plus belle chose qui lui soit arrivé dans sa vie.

-Un jour, je serai un adulte et je vais être le plus fort alors je vais pouvoir te protéger des méchants, lança Connor, avec une certaine de fierté dans la voix.

Sa mère eut un rire en embrassant son fils sur la joue et tout les deux repartirent en direction de chez grand-maman, pendant que le petit Connor s’amusait à combattre des méchants imaginaires. Madame O’Brien avait retrouvé un peu de son sourire et tout ce qu’elle souhaitait pour son fils, c’était de réaliser ses rêves, mais surtout, d’avoir des projets sur lesquels s’accrocher pour tenir bon.

Fin du flashback

Les autres loups hurlaient, sentant que le sang allait bientôt couler à flot. En effet, un combat se dessinait entre le chef et le petit nouveau, ce qui animait les instincts de prédateurs de chaque lycans qui encerclaient l’Alpha et Connor. A peine 10 mois qu’il faisait parti du clan et il osait déjà défier l’Ulfric actuel, une action suicidaire selon plusieurs et qui allait inexorablement lui coûter la vie. Mais Connor n’en avait cure de tous ces ragots de vieilles, car tout ce qu’il voulait, c’était de goûter encore un peu plus au pouvoir. C’était le pouvoir complet ou rien avec lui et c’est pourquoi il allait déchiqueter Médor-le-chien-chien en moins de deux. Il avait réussit à parfaire ses techniques de combats lorsqu’il était sous sa forme lycan, mais surtout, sa transformation n’était plus un supplice comme avant. Il n’avait plus l’impression qu’un brasier irradiait tout son corps et que ses os se tordaient. Non, maintenant, quand il se transformait, il se sentait renaître. Cependant, depuis qu’il était dans ce groupe, il y avait toujours eu quelque chose qui avait manqué à Connor et maintenant qu’Emily lui avait ouvert les yeux, il avait comprit que c’était simplement parce que, hiérarchiquement, il n’était pas à sa place. Il allait toutefois y remédier, d’autant plus que le salopard avait emprisonné Emily. Il repensait à ce qu'il avait un jour dit à sa mère et depuis qu’Emily lui avait planté cette idée dans la tête qu'il pouvait être le chef de meute, elle avait germée et ses racines s’étaient maintenant bien ancrées dans son esprit : il allait devenir Alpha, un point c’est tout, car c'était ce à quoi il avait aspiré depuis des mois. Ce souvenir avec sa mère comme point d’ancrage gonfla le lycan de courage et il se sentait d’attaque pour se faire une belle réputation au sein des lycanthropes.

-T’as un dernier truc à me dire Connor avant que je te fasse saigner?
-Ouais. Je vais me faire un plaisir de revendre ta peau de loup lorsque je t’aurai tué. Remarque, avec ta gueule, tu ne dois pas valoir cher.

Si le regard de l’Alpha pouvait tuer, Connor serait foutu, mais ce n’était pas le cas. L’Alpha finit par bondir sur lui, tout en se transformant. Connor ne se fit pas prier pour enfiler sa peau de loup et de mordre lui aussi. Il était plus frêle que son ennemi, mais il comptait sur sa ruse et son intelligence plutôt que sa carrure, une chose que l’Alpha actuel semblait manquer parfois. Le secret : viser le cou. Tout bon lycan savait que la jugulaire était un endroit propice à l’écoulement rapide du sang. Connor savait qu’il n’était pas assez fort pour maîtriser l’autre, mais l’important était qu’il soit le plus rapide. La nuit, il s’était souvent entraîner, pendant que le jour, il gérait son entreprise tout en planifiant ce moment où il allait éliminer l’Alpha du groupe pour prendre sa place. Pendant des mois, ça avait été ses habitudes et lorsqu’il allait devenir le chef de la meute, il n’allait pas perdre cette manie de courir dans la nuit et de hurler avec ses loups, jusqu’à ce que le soleil se lève et qu’il reprenne le boulot à l’entreprise. Connor voulait que ses aspirations se réalisent enfin et il avait l’impression que c’était le bon jour. Il laissa l’imbécile se fatiguer pendant que lui évitait les coups de dents, attendant le moment propice pour attaquer. Lorsqu’il jugea que c’était maintenant ou jamais, Connor se jeta sur le cou de son adversaire et mordit à pleine dent, pendant que l’Alpha glapissait de douleur. Quelques minutes suffirent pour que l’autre loup s’écroule et qu’il se vide tranquillement de son sang. L’ancien Alpha reprit sa forme humaine et Connor aussi.

-Selon moi, tu ne vaux même pas deux cents, lança-t-il, froidement.

Il se leva, à poil, et cracha près de l’ancien Alpha.

Flashback

Connor n’écoutait même plus les explications d’un de ses associer, perdu dans un tourbillon de penser qui ne cessait plus de le tourmenter depuis plusieurs semaines. Vivre parmi les humains lui était difficile depuis quelques temps, car il détonait. Certes pas explicitement, puisqu’il ne pouvait pas parler de sa lycanthropie avec un mortel, mais son mode de vie n’était plus le même. Il n’était plus humain et se sentait donc complètement décalé de cette ancienne vie de mortel…et tout cela à cause d’une bagarre avec un homme qu’il avait cru humain…jusqu’à ce qu’il se transforme en un énorme loup et qu’il le morde. Il allait l’achever, mais il n’avait pas eu le temps, car un groupe de jeunes s’étaient pointé et il avait du déguerpir, laissant Connor au bord de la mort. L’homme d’affaire avait crut s’être débarrassé de cette histoire lorsqu’il s’était réveillé à l’hôpital, mais les pires jours de sa vie avaient finit par poindre. Son goût accentué pour la viande saignante, ses brûlures à chaque fois qu’il touchait un couvert d’argent, son agressivité exacerbée…Connor avait cru devenir fou, mais le supplice n’avait fait que commencer.

Lors de la dernière pleine lune, alors qu’il était à Saint Louis, sa journée avait été infernale, car une violence extrême l’avait habité. Une envie folle de s’attaquer à ses employés et ses associés l’avaient démangé toute la journée. Mordre leur chair, faire craquer leur os sous ses dents et les faire saigner, c’étaient tous ce qui lui avaient passé par la tête, jusqu’à ce qu’il décide de foutre le camp du boulot, histoire de ne pas commettre de génocide. Il avait la mine pâle et tremblait et c’est pourquoi il avait cru bon de pieuter, se disant qu’il couvait peut-être bien une maladie. Appeler les toubibs? Le fait que cette simple idée lui ait effleuré l’esprit le faisait rire aujourd’hui. Lorsque la nuit était finalement tombée et que la lune s’était montrée, Connor avait cru que l’enfer s’était déchainé sur lui. La douleur qui lui avait parcouru le corps avait été atroce. Il avait eu l’impression que toutes ses chairs se déchiraient et des grognements inhumains n’avaient cessés de sortir de sa gorge. Lorsque sa transformation fut complète, le hurlement que Connor avait poussé fut telle qu’il avait du réveiller une bonne partie du voisinage. Désorienté, Connor s’était heurté à tout le mobilier de la chambre. Inaccoutumé à cette nouvelle motricité de quadrupède et à cette vision plus perçante, l’homme d’affaire avait littéralement paniqué, mais s’est après quelques minutes qu’il était parvenu à se calmer, lorsqu’il croisa sa propre image dans une glace. Enfin, calmer était un grand mot ; il avait plutôt figé et grogné en voyant l’énorme loup. Connor avait ensuite reculé, tout aussi désorienté qu’au début. Son goût exacerbé pour le sang s’était fait plus violent et il n’avait pas pu résister à la tentation de sortir de sa demeure provisoire, qui lui avait semblé comme une cage. Fuir loin et se cacher, voilà ce qu’il avait pensé faire, mais son chemin avait croisé la meute de Saint Louis ce soir là.

-Monsieur O’Brien?

La voix d’un de ses collègues le tira violement de son mutisme et Connor darda un regard sombre dans celui qui venait de l’interpeller. Il se radoucit toutefois en se massant les tempes. Putain, ces dernières nuits à tenter de contrôler sa lycanthropie avec l’Alpha lui bouffait toute son énergie et il commençait à en avoir raz le cul, d’autant plus que ça lui donnait un caractère de merde.

-Pardon. Je fais de l’insomnie ces derniers temps, alors je pars dans les vapes souvent, mais allez-y. Répétez-moi votre question qu’on en finisse et que je puisse me barrer chez moi pour enfin dormir.

L’entretient dura encore quelques minutes et lorsqu’il prit fin, Connor ne se fit pas prier pour décoller. Arriver chez lui, il débrancha le téléphone, ferma son mobile et s’écroula dans son lit, avec l’idée bien nette d’emmerder tout le monde pour le reste de la journée et de pieuter comme il n’avait jamais pieuté de toute sa vie.

Fin du flashback

Les autres lycans étaient silencieux et perplexes, regardant leur nouvel alpha d’un air confus. Connor avait la bouche pleine de sang de l’ancien chef de meute et un de ses bras saignait à cause d’une morsure. Il avait foutrement mal, mais par tous les saints, ce bordel de combat en avait valu la peine. Connor éclata de rire, enivré par sa victoire, même si le remord d’avoir tué un de ses semblables commençaient tranquillement à s’immiscer en lui. Le nouvel Alpha tentait de le chasser ; ce n’était pas le moment de briser son rêve avec des regrets. Après tout, c’était la loi du plus fort et il s’avérait qu’il venait de se hisser au-dessus de la hiérarchie comme un chef. Bientôt, ce fut les autres lycans qui rirent avec lui, pendant que l’ancien Alpha s’éteignait doucement. Il arrêta soudainement de rire et empoigna un des autres lycans, le regard foncé plutôt menaçant, faisant ainsi taire les autres :

-Toi! Sais-tu pourquoi j’ai défié l’ancien Alpha?
-Bah à cause d’Emily…

Connor ne le laissa même pas ajouter le moindre mot et il le balança par terre.

-Il n’y a pas que ça, imbécile!

Il s’adressa ensuite à toute la meute, autoritaire et complètement dégoûté de voir que les autres pensaient qu’il faisait du favoritisme. Ouais, il était tombé amoureux comme un idiot et la beauté d’Emily avait eu raison de lui, mais la justice avait une importance capitale aux yeux de Connor.

-Si je l’ai défié, c’est parce qu’il l’a injustement emprisonné. Je n’accepterai plus ce genre comportement de taré, vous entendez? Elle avait défié la Lupa dans les règles et les règles, j’y tiens. Dorénavant, il n’y aura plus d’écart de ce genre ou c’est vous que je vais saigner. Sur ce, je vais aller libérer celle qui sera votre nouvelle Lupa et je m’en tape de savoir si vous êtes pour ou non pour le moment. Vos cries du cœur, vous les garderez pour plus tard.

Il y eut alors un gros silence et le cœur de Connor se mit à battre un peu plus vite, car il sentait l’hostilité de quelques-uns transparaître à travers leurs traits. Si l’envie leur prenait de le trucider sur place, il savait pertinemment qu’ils en seraient capable. Cependant, lorsqu’il courut en direction des cachots et qu’il se transforma en loup, il entendit les hurlements des autres lycans derrière lui et leurs pattes fouler le sol. Connor accéléra la course, animé par le désir d’aller retrouver Emily le plus vite possible et ce, pour lui annoncer qu’ils allaient maintenant tenir les rennes de ce groupe de loupiaux et rétablir l’ordre au sein de la meute. Connor allait s’imposer d’ailleurs, car il aimait bien quand ça fonctionnait à sa façon. De plus, il avait toujours trouvé que Médor gérait le tout comme un incapable, mais dans l’esprit de financier du nouvel Alpha, tout devait être géré comme une entreprise, qui fonctionnait un peu comme un groupe ou une société selon lui et ça, ce n’était pas tout le monde qui détenait le talent de la finance. Mes louveteaux, il va y avoir du changement à la sauce O’Brien. Je vous souhaite donc la bienvenue dans un nouvel ère au sein de la meute de Saint Louis, mes petits, pensa Connor, avec une satisfaction magnifique lui envahissant l'intérieur.