La Révélation ne tarderait plus. Du moins, c’est ce que laissaient penser les médias. Chaque jour, les journalistes et autres animateurs d’émissions quelconques, n’avaient de cesse de déverser un flot continu de paroles insensées. Des débats stériles ; terrains de jeu d’intervenants toujours plus illuminés, ou à l’esprit toujours plus étriqué. Ces gens qui parlent sans savoir, de choses qu’ils ne connaissent pas. Car il est impossible de parler de CESS, de démêler leurs instincts et leur nature profonde, sans en être un. Comment réagiraient ces gens, s’ils avaient vu en plus des vampires et des lycans, cette créature gigantesque qui a tué des centaines de personnes par sa simple présence ? S’ils apprenaient de la bouche des tibétains, que dans les montagnes éternelles de l’Himalaya se terrent des monstres immortels, capables de cracher le feu de l’Enfer ? S’ils avaient conscience de mon vilain petit secret ? En ce qui me concerne, je verrais bien vite la splendeur aseptisée d’un scalpel. D’ailleurs, m’est avis que certains non-morts et autres mortels à fourrure, ont déjà les frais d’une science un tantinet trop curieuse.

Las d’entendre toujours les mêmes paroles, je coupai mon autoradio et demeurai, le temps d’un instant, dans le silence complet. La ville toute entière semblait morte, et il n’était que vingt heure. L’armée avait imposé son couvre-feu, et la population toute entière faisait preuve d’une parfaite soumission à une telle autorité. On ne me pouvait pas en dire autant de ma personne. Après tout, je ne faisais en aucun cas partie de cette population, terrifiée à l’idée de finir son existence stérile sous les crocs d’un vampire affamé. Et puis, depuis toujours ma vie se jouait la nuit ; jamais l’armée ne m’empêcherait de gagner ma croûte.

Mon indic tardait à venir, et l’attente commençait à se faire longue. Les secondes s’écoulaient à mesures que mes doigts agacés martelaient le volant de ma voiture. Exaspéré, j’arrachai finalement les clés du contact, et sortis du véhicule. D’une main habile, j’extirpai mon paquet de cigarette de la poche de ma veste et, m’assurant de n’être vu de personne, l’allumai d’un claquement de doigts. Au contact du feu, ces derniers laissèrent apparaître leur forme véritable. Des griffes, plus puissantes que celles des vampires et des lycans, tranchantes comme des rasoirs, semblant avoir été soutirée à la Bête elle-même.

M’appuyant, d’un geste nonchalant, contre le coffre de ma voiture, je laissai les effluves de la cigarette m’enivrer. Et puis, un bruissement à peine audible attira mon attention. Immédiatement je rouvris les yeux, leur lueur ambrée se posant sur l’obscurité. Je n’étais pas capable de voir dans la nuit, ni de sentir mes ennemis, mais l’instinct du chasseur comblait parfaitement toutes ces lacunes. « Qui est là ? » Demandai-je sèchement à l’Inconnu. Car, quand bien même tentait-il de se faire discret, je savais qu’il était là.