« J'ai l'impression d'être Van Helsing. Allez, t'as encore fait un pas vers l'avant ma grande. Prochaine étape : te mettre à profaner des tombes. Oui, il ne manque plus que ça à ta panoplie. » Bon, ce n'est pas comme si elle n'en avait pas l'habitude. Elle en avait profané beaucoup, des tombes. Elle avait ouvert des tombeaux, dérangé des momies dans leur long sommeil... Tiens, c'est peut-être pour cette raison que tant d'ennuis lui collent à l'arrière-train désormais ? Eh bien oui, vous savez, les malédictions, toutes ces superstitions-là... Mais bref. Tout ça, elle l'avait fait dans le but de parfaire le savoir humain. Eh oui. C'est qu'auparavant, elle avait une excuse. Aider à mieux cerner le passé, et ce genre de bêtises. De plus, le tout se faisait dans un cadre professionnel, mais désormais ce n'est plus le cas. Ses recherches se trouvent être faites dans un cadre personnel, et... Ça complique grandement les choses. Sa conscience. Oui, et sa conscience alors ? Et puis, imaginez un peu si une autre personne venait à le savoir. Savoir quoi ? Pour... Ses transformations bizarres qu'elle-même a encore du mal à comprendre. Eh bien, vous voyez, cette planète porte des individus tous les uns plus différents des autres. Il y a des bruns, des roux, des blonds, des personnes excentriques qui dans une quête de reconnaissance inassouvie se peignent les cheveux en bleu, en rose, puis il y en a d'autres qui comme Britney Spears pètent les plombs et se rasent les cheveux, d'autres encore qui comme Pamela Anderson naissent avec une notion de l'argent des plus étranges et font de leur poitrine un bien des plus précieux et quasiment un investissement... Et puis il y a les gens comme Dylan. Ou du moins, les gens auxquels Dylan pensait ressembler. Les gens qu'on ne remarque pas, ceux qui se fondent dans la masse, et qui font tranquillement leur petit bout de chemin en ayant une vie des plus banales mais qui leur correspond. Qui se marient, ont des enfants, adoptent des chiens et des pigeons. Honnêtement, qui aurait pu s'imaginer une seule seconde que Dylan se découvrirait des talents de... Métamorphe ? Dylan... Depuis son plus jeune âge, elle ne s'est jamais démarquée des autres. Ou du moins, jamais démarquée en bien. Que ce soit ses notes en cours, ou ses passions, rien. Oui, parce que, soyons honnêtes, une passion pour les momies, les morts, les langues mortes et bien des choses qui ont un lien de près ou de loin avec le morbide... Bof, il n'y a vraiment pas de quoi se vanter là-dessus, non ? Même que ça donne l'air ringard. Déjà qu'elle n'était pas une fashionista... Enfin bref. Elle n'a même jamais eu quoi que ce soit de spécial dont se vanter. Vous savez, du genre « Moi je chante troooop bien » … Elle chante comme une casserole. Lorsqu'elle se met à faire des vocalises, des pluies torrentielles s'abattent sur la ville, son « talent » pour la musique ne lui serait utile qu'au Sahara. Enfin, quoique... Si, elle a un talent. Son seul talent depuis toujours est d'être copine avec le Pitbull du voisin, Harry, qui a déjà failli avaler un bébé tout entier. Autant dire que ça tient du miracle, non ? Elle n'a peut-être pas attiré des foules d'admirateur étant jeune, mais elle a attiré les chiens et les animaux en général, c'est déjà une chose de faite. Allons, soyons positifs. Et pourtant, question beauté, là, enfin, il y a bien quelque chose dont elle peut se vanter. Tout d'abord, un charme indéniable. Il y a quelque chose dans son regard, dans ces deux pierres de jade qu'elle a pour yeux, qui la rendent intrigante. Et puis, son visage, si inexpressif et expressif à la fois... Un mystère à lui seul. Enfin, il y a son air d'enfant effronté qui ne la quitte jamais, et qui ne l'a jamais quittée depuis son plus jeune âge. Tout comme son air « blasé »... Mais attention, c'est un leurre, un piège ! Plus observateur qu'elle, il n'y a pas. Elle ne rate rien, quasiment rien, aucun détail. Disons juste que c'est parce qu'elle est atteinte du premier stade de la paranoïa, qui est la méfiance. Et autant dire que ça s'empire de jour en jour. Mais on ne peut pas lui en vouloir vu toutes les informations qu'on lui a balancé au visage, non ? Bref ! Donc, on en était où ? Ah oui. Son physique de déesse. Les traits de son visage sont doux mais précis. Un joli nez, de fines lèvres légèrement rosées... Et puis, pour finir, une peau blanche, très blanche. Elle ferait de l'ombre même à Blanche-Neige, et ce n'est pas rien, non ? En ce qui concerne sa silhouette... Eh bien, elle est mince, mais sans être dans l'extrême. Elle a un corps sain, et elle l'a mérité. Elle a toujours été très sportive. Elle mange comme trois, mais elle est sportive, un bon équilibre en fin de compte. Et puis, avouons-le, être sportif lorsque l'on habite dans la Nouvelle-Orléans est désormais une nécessité, surtout pour les pauvre humains et humaines sans défenses, les mortels si vous préférez. Lorsque l'on ne fait pas le poids, on fuit, purement et simplement. Donc la course à pieds doit être l'un des talents innés des humains de la région. Enfin, une humaine, une humaine tout à fait normal... Elle ne l'est plus. Elle ne l'a jamais été. Mais elle ne peut tout de même cesser de se languir de l'époque où elle n'était au courant de rien. Elle se voilait la face, mais c'était bien mieux ainsi lorsqu'elle ignorait tout de ce monde parallèle.

Oui, car c'est à un monde parallèle auquel a fini par accéder Dylan. La cause ? Ses dons de métamorphe. Vous voyez, Pokémon ? Eh bien, dans la série animé, ainsi que dans les jeux vidéos, il y a une bestiole du nom de « Métamorph » qui peut copier la forme des autres pokémons. Dylan est un peu comme lui, à la seule différence qu'elle n'est pas une masse de molécules visqueuses et roses. Enfin, même si pour l'instant, elle n'arrive à rien, et lorsque c'est fait, alors ce n'est pas de son plein gré. Ah... Et dire que sa vie a auparavant été des plus tranquilles. Quelle belle période qu'est son enfance, en fin de compte. Elle est née dans une famille modeste, mais n'a jamais manqué de rien. Sa mère, une belle italienne aux yeux verts – d'ailleurs, la jeune américaine a hérité bien des traits physiques de sa génitrice – avait commencé par être femme au foyer pour s'occuper de son enfant unique qu'est Dylan avant de finalement se mettre à travailler en tant que secrétaire, et son père était un simple employé de bureau. Toute cette jolie petite famille vivait à Shreveport, dans une routine assommante. Et combien de fois la belle brune s'était plainte de cette routine. Chiant, chiant, ennuyeux, chiant... Voilà ce qu'elle répétait à longueur de temps. Elle voulait un peu d'aventure, du peps... Maintenant qu'elle en a, elle le regrette. Ah, ils sont si agaçants ces humains, n'est-ce pas ? Jamais contents, éternels insatisfaits, contradictoires qui plus est.

« Où est-ce qu'il est ? C'est bon. Je vais sûrement servir de dîner à quelqu'un avant même de le trouver. » dit-elle en soupirant, agacée. Rowan. Rowan. Elle ne jurait plus que par lui ces temps-ci. Et par le révérant. Elle n'a jamais été très croyante mais... Il a été le seul à lui venir en aide. Il lui a expliqué de nombreuses choses, et l'a même aiguillée vers une personne ayant les mêmes dons qu'elle, vers un autre métamorphe en somme, qui n'est autre que Rowan. Et depuis, elle ne le lâche plus d'une semelle. Elle s'était transformée en stalker, à le suivre partout. Eh, attendez. Lui est passé par toutes les épreuves qu'elle allait, justement, avoir à surmonter. Au moins qu'il lui dise à quoi s'attendre et qu'il la tienne un peu au courant. Sauf qu'elle n'arrivait pas à le trouver. On aurait dit qu'il avait disparu de la circulation, ou qu'il l'évitait. Mais cela ne changeait en rien le fait... Qu'elle n'en pouvait plus. Bon dieu, mais elle n'en pouvait plus. Désormais, trois possibilités lui restaient. Se faire vider de son sang par un vampire, se faire dévorer par un loup-garou ou quelque chose dans le même genre, et puis, en dernière position... Mourir de fatigue. Elle marchait depuis deux bonnes heures. Elle traînait dans cette forêt, encore et encore, et le pire, c'est que si quelque chose venait à lui arriver, elle ne serait pas la seule victime. Le pauvre petit Hunter aussi risquait d'y passer. Hunter, son Pomeranian nain blanc qui ne la quitte jamais d'une semelle. Quand je vous dis qu'elle attire les animaux comme un aimant... Enfin bref. Si elle avait peur ? Un peu. Et pourtant, elle n'a jamais été une lâche, ni quoi que ce soit de ce genre. Au contraire, elle est très courageuse. Mais, avouons-le, savoir que dans le même environnement que le votre résident des créatures au pouvoir dix mille fois supérieur aux forces que vous possédez et surtout que leur terrain de chasse favori est la forêt, dans laquelle vous vous trouvez actuellement... C'est déjà un énorme acte de hardiesse de s'y aventurer... Bon, de manque de bon sens aussi, mais passons. C'est déjà énorme. Lui demander d'y rester tout en gardant son calme était au dessus de ses forces. Elle était le gibier, et ils étaient les chasseurs. Un nouveau soupire se fit entendre alors qu'elle rebroussait finalement chemin. En fin de compte, quelque chose clochait dans le coin où elle se trouvait... Pour le bien-être de l'humanité... Enfin, pour son bien-être surtout, elle avait intérêt à débarrasser le plancher sur le champ, au risque de devenir elle-même un corps non identifié sur lequel travailleraient d'autres archéologues dans les siècles à venir.




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« C-Ca recommence. » dit-elle, alors recroquevillée sur elle-même et assise dans un coin de son appartement. Ces tremblements, ces vertiges... Ça recommençait, encore. Et désormais, elle en connaissait la cause. Ces réactions de son corps qu'elle qualifiait généralement « d'horreurs » lui menaient la vie dure depuis ses dix-sept ans. Elle s'était rendue chez tous les médecins de la ville, et aucun n'arriva à percer son secret. Ce fut finalement un homme vouant sa vie à Dieu qui vint à son secours et qui l'aida à y voir plus clair. Et grâce à lui, elle se porta mieux. Sauf qu'elle n'était qu'humaine, après tout. Et se sentir aussi différente, avoir autant de mal à contrôler ce « don »... Enfin, non, elle ne considérait pas ça comme un don. Elle considérait ça comme une plaie. Un don... Faire de la télékinésie est un don, être médium est un don... En quoi se transformer en un chat de gouttière est-il un don ? Oui, son opinion était assez arrêté là-dessus. Mais malheureusement, elle n'avait d'autres choix que de faire avec. Sauf que... Parfois, elle avait à faire face à de telles... De telles atrocités dont son corps prenait la forme que c'était chose difficile. Encore une fois, on l'avait poussée à bout. Sa journée à la faculté avait été désastreuse. En premier lieu, une amie de longue date lui tourna le dos. Une amie à laquelle la jeune femme avait prêté une somme d'argent considérable, qui devait lui servir, à la base, de passe pour des vacances de rêve. Sauf que son amie n'avait pas de quoi payer le loyer, donc naturellement... Notre belle américaine avait fini par craquer, et par venir à son aide. Dylan a toujours eu bon cœur. Serviable, généreuse, elle ne dit jamais non à donner un coup de main à qui que ce soit. Elle râle parfois, mais elle finit par agir. Et elle ne compte pas. Mais on peut voir ça comme une qualité tout comme un défaut, dépendant des situations. Enfin, généralement, la jeune femme se fait rarement embobiner, tout de même. Elle est plutôt méfiante, observatrice, et elle ne se laisse pas amadouer facilement. Mais voilà, il y a toujours des gens qui y arrivent. Comme cette pimbêche. Et dire qu'en plus, cette écervelée ne l'a même pas remboursée. Oh, elle ne laisserait pas passer ça. Harceler les gens est une des spécialités de Lily. Elle est très déterminée et têtue. Trop, en fait. Tellement que ça peut en devenir... Insupportable. Car quand elle a quelque chose en tête, alors elle ne lâche pas, jamais, jusqu'à l'avoir. Et plus elle s'impatiente, plus elle devient insupportable. Mais elle ne lâche pas. Et encore une fois, il s'agit là aussi d'une bonne comme d'une mauvaise chose, dépendant des situations et des personnes ayant à le supporter.

Mais, cet événement ne fut pas le seul à venir amocher sa journée. Un appel de ses parents, lui disant qu'elle devrait se débrouiller pour payer le loyer de son appartement seule pour le mois à venir, empira son état. Elle était métamorphe, et non pas sorcière. Et encore, même les sorciers ne peuvent pas faire pleuvoir de l'argent. Enfin, allez savoir. Il faut dire qu'elle ne savait encore rien sur les sorciers. Mais bref. Cette nouvelle ne fit que l'enfoncer encore plus. D'accord, elle ne pouvait pas leur en vouloir, eux-même n'avaient pas beaucoup d'argent... Mais elle était tout de même dans de beaux draps. L'autre pimbêche n'allait sûrement pas lui rendre ses économies, elle n'allait pas avoir de quoi payer son loyer, et ajoutons à ça tous les problèmes liés aux mutations de certaines parties de son corps depuis quelques jours... Et ça allait se reproduire, elle le savait. C'est bien pour cette raison qu'elle avait tant voulu rencontrer Rowan la veille. Parce qu'elle voulait en savoir plus. Un moyen de contrôler ça, d'empêcher ça... Et autant dire que ce n'était pas une mince affaire d'avoir le dessus sur toutes ces mutations, transformations et on ne sait quoi. Ses sauts d'humeur influencent ces différentes mutations. Et par moments, elles sont partielles, n'atteignent que certaines parties de son corps, et le résultat ne donne rien... D'humain. Après vingt-et-un ans d'une vie tout à fait tranquille, voir les choses tourner ainsi... Ce n'est pas simple à accepter. Sans oublier qu'en découvrant ses capacités, la jeune femme a aussi découvert le surnaturel en général, chose à laquelle elle ne croyait pas. Les vampires, les lycanthropes, les sorciers... Ils n'avaient existé que dans son imaginaire. Pas une seule fois elle n'avait cru en leur existence, et voilà qu'ils se révélaient tous désormais, apparaissant alors comme un nez au milieu de la figure. Toujours dans son coin, elle reniflait, tentant de ne plus y penser et de se calmer, sa petite boule de poile assise à ses côtés... Sauf que le calvaire qu'elle tentait d'éviter recommença une nouvelle fois. Et voilà certaines parties de son anatomie qui se modifiaient, tout cela tournant finalement à une transformation partielle. Qu'avait-elle fait pour mériter un tel quotidien ? Mais elle savait très bien qu'il n'y avait aucun moyen de s'en débarrasser. Seulement s'en accommoder, et l'accepter. Et puis le lendemain, tout reprendrait son cours normal. Le jour, elle irait suivre ses cours. Et le soir, elle irait fouiner histoire d'en savoir plus sur le mal qui la malmenait. La roue ne s'arrêterait pas de tourner.