Je ne m'étendrais pas trop là-dessus, car soigneux de ma personne j'aime passer du temps devant un miroir à fixer avec inquiétude la moindre ride ou imperfection qui viendrait ternir mon outil de séduction. Bref, de manière générale, j'ai toujours été d'une grande taille, ce qui agace la plupart de mes supérieurs qui me trouvent imposant pour des missions d'infiltration. Je suis tout ce qu'il y a de plus ordinaire. Maintenant libre à eux de me tenir à l'écart juste parceque je possède quelques centimètres de plus que la moyenne. Mes cheveux présentent un brun proche du châtain clair, les laissant rebelle la plupart du temps. Il m'arrive parfois de les dompter à coups de gel, mais c'est une chose plutôt rare que je réserve seulement à mes invitées aux formes envoutantes. J'aime les avoir cours et déteste les avoir longs, premièrement parce qu'un gars en uniforme avec une queue-de-cheval n'est pas bien vu par ses collègues, deuxièmement parce qu'il est plus difficile d'aborder les jeunes femmes avec ce genre de coupe. Cependant je ne suis pas contre de les avoir de temps en temps mi-long. Sinon depuis tout petit déjà on m'a rabâché que j'avais les yeux de mon père et le sourire de mon défunt grand-père. Ne connaissant que très peu mon aïeul je ne peux que confirmer en voyant quelques photos fatiguées par le temps, oublié de-ci de-là dans l'album de famille. Mon père était un modèle à mes yeux. Dur certes, mais ses yeux en disaient long sur son passé et son regard ne trompé pas. Il était un fin maître dans l'art de la tromperie et intimidé avec brio ses adversaires sans même montrer la moindre lame ou le moindre calibre. À l'époque j'étais fasciné par ses montagnes de muscles et sa façon de se faire obéir. Oui je l'étais. Maintenant il n'est plus qu'un petit truand enfermé derrière des barreaux attendant que sa condamnation s'estompe. Que vous dire d'autre? Mes yeux sont bleus clair, ma peau est légèrement blafarde et je n'ai aucun souci au sujet de ma pilosité. Physiquement je n'ai rien d'un Schwarzenegger, mais je sais me défendre et faire comprendre ma façon de penser. J'ai appris à coups de poing et de gueule dans le bronx, alors ne pensez surtout pas que je suis comme tous mes camarades de brigade entrain de hurler en pointant une arme. Peut-être que je suis fou, mais j'ai un semblant de raison. Si le danger est trop grand je ne prendrais pas le risque de m'y aventurer les poings bien en évidence.

On peut à raison me qualifier de joueur. J'aime m'adonner à ce genre d'activité. C'est un sport comme un autre. Bien qu'il m'ait apporté pas mal de soucis qui restent encore à ce jour un problème de taille. Parfois il m'arrive de contrôler ce désir et de m'occuper à diverses tâches comme boire une bière devant un match de boxe ou me donner un peu de plaisir devant les magazines que me prêtent gentillement certains de mes collègues, fatigué d'admirer les mêmes courbes à longueur de journée. Après tout, ce n'est pas les femmes au corps charnu qui vont me donner de quoi subvenir à mes besoins. L'argent peut rendre n'importe quel homme heureux et être un bleu n'aide pas forcément à arrondir les fins de mois. Si vous saviez comme parier et devenu chose simple. Je ne peux vivre sans jouer. C'est un choix. Une façon de vivre et c'est une décision que j'ai adopté depuis tout gosse. Ceci dit j'aime partager mes gains. Ayant connu la misère donner aux autres est la moindre des choses. Riez si cela vous amuse. C'est vrai que ma générosité me fait passer pour le héros du peuple, volant au plus riche pour donner aux pauvres, mais je n'en reste pas moins humble et de toute manière la moitié tombe toujours entre les griffes d'une douce créatures aux lèvres aguicheuses. Elles sont tellement fascinante et indéniablement séduisante. Leur regard vous transperce et fait de vous un pantin entre leurs mains. Vous comprenez maintenant pourquoi il m'est difficile de ne pas les aborder. Il faut leur faire sentir qu'on les aime, sinon elles se fanent et afficheront quelques années plus tard des rides aux coins de leurs yeux regardant avec gourmandise le premier jeune homme qui aurait pu, vingt ans plus tôt, les faire rêver. Je peux les comprendre. Parfois il m'arrive de fixer mon reflet dans un miroir ou une vitre et de me répéter inlassablement que je resterais un éternel lourdaud livré à sa solitude. C'est déprimant, mais que voulez-vous, je suis flic et qui plus est fraîchement enrolé dans les forces spéciales de cette B.R.I.S.

Appartement 15, Delancey Street. Le 02 Août 2011.

Je me suis souvenu de ton sourire ce soir-là. Tu étais tellement fier. Pour la première fois de ma vie j'avais dépouillé des pauvres bougres qui faisaient une photo de groupe devant le taureau mécanique de chez stinky ton bar préféré. Mon butin était pauvre contrairement à ceux de mes ainés, mais ton sourire m'a donné l'envie de me surpasser. Bien sûr, maman était contre tes pratiques. Je la vois encore hurler sur toi te suppliant d'arrêter tes conneries et d'épargné tes enfants. À l'époque je pensais mal faire, mais je compris bien vite que tes méthodes étaient plus que douteuses. Ce même jour, devant la bête mécanique se trouvait une femme. Elle devait être d'une beauté à couper le souffle pour que son visage hante encore mes nuits. Un sourire. Elle aussi était heureuse, mais le sien était différent du tien. Il était aimant. À ses côtés se tenait un chien. Un husky il me semble. J'ai toujours était fasciné par ces chiens. Je n'étais pas très grand à l'époque, mais l'animal me paraissait énorme et impressionnant. Je m'étais dit que pour avoir une telle bête il fallait énormément d'argent. Égoïstement j'aurais voulu que ce chien jette un oeil vers moi et m'adopte. Moi. L'enfant des rues. Un bâtard Keenan dans les rues du bronx. Seulement je n'étais qu'un déchet sur un trottoir. J'étais subjugué par ce chien tu sais? Vraiment.

Appartement 15, Delancey Street. Le 10 Août 2011.

Il parait que tu dois écrire. C'est la réponse que m'a donné un médecin.Apparemment ils attendent une vérité. Ta vérité. Mais quelle autre vérité sinon la tienne pourrais-tu bien donner et la tienne a-t-on dit est monstrueuse. Les gens sont-ils capables d'admettre une vérité monstrueuse? On a décidé, n'est-ce pas, qu'une vérité devait être raisonnable hors la vérité t'es inconnu. Tu as toujours préféré te glisser dans le mensonge et l'escroquerie. J'ai encore quelque bref souvenir de ces différents trafics qui se tenait tard la nuit. Le jour tu nous envoyais telle des pigeons voyageurs. Ca t'était totalement indifférent de savoir si moralement on avait peur. On était de la marmaille pour toi. Rien de plus. Au fond tu n'était pas un sale type, mais t'avais un coeur de pierre. Tant que tes billets caressaient tes mains le reste n'avait plus d'importance. Pendant toute mon enfance tu t'es entêté à nous apprendre les bassesses du crime sans faire couler une goutte-de-sang à quiconque. Pourtant tu ne faisais que mentir. Maintes fois je t'ai vu le visage en sang, une balle enfoncée dans la chair de ta cuisse. La violence n'a jamais frappé les Keenan. Tu parles. Foutaise. D'ailleurs je suis sûr que la disparition d'Heaven est en rapport avec toutes ces magouilles qui faisaient pleurer maman. Tu te souviens de ses larmes? Tu les détestais au point de les fuir. Elle t'as toujours pardonné pour tes fautes. Pas moi. Je refuse. T'es qu'un pauvre type. Tu le sais, mais je préfére te l'écrire. Petit déjà, je savais que t'étais coupable. Elle n'était plus là. Cette fille. Heaven. 17 ans et jolie.

Vol 148. New York- Missouri. Le 15 Septembre 2011

Tu me manques. J'ai arrêté de t'écrire durant un temps. Il le fallait. Cependant je regrette de t'annoncer mon départ entre deux états. Les secousses ne jouent pas en ma faveur. J'aurais pu venir te voir, mais le coeur n'y était pas. En plus comment te dire que je quitte l'état de New York pour le missouri, tu me prendrais pour un dément. La vérité c'est qu'on m'a muté. Mes supérieurs affirment que je suis un bon élément, mais difficile à dompter. Merde je fais mon boulot. Si j'aboie où est le mal? D'ailleurs quand j'ai passé le test d'entrer à l'école de police tu t'es permis de me rire au nez et de me dire droit dans les yeux que jamais je ne serais un petit fonctionnaire de police docile. Tu n'étais pas le seul de la famille à trouver mon initiative totalement futile, mais maman croyait en moi et c'est tout ce qui m'importait. En plus tu étais soupçonné et Heaven n'était plus avec nous. Est ce qu'elle te manque? Moi oui. Que fais-tu de tes journées depuis ma dernière visite? Le médecin me dit que tu ne fais que dormir. En tout cas j'en ai pour 1 h de vol. Mes yeux sont plutôt lourd. Je ne savais pas que l'altitude me faisait cet effet. Peut-être que j'ai hérité ça de toi. Dans tous les cas je demanderais à maman de te donner l'adresse de mon nouveau chez moi, histoire que tu continues à m'écrire si tu daigne un jour me répondre. C'est à Saint Louis précisément. La ville des créatures dit-on. Sur toutes les chaines du câble ils ne font que passer des scènes macabre, ensanglanté. C'est horrible. Comment peut on faire ça? Ce sont des actes de barbarerie. Ce matin avant de monter dans l'avion, j'écoutais accoudé au bar de l'aéroport un témoin. C'était une vieille femme qui murmurait inlassablement que la fin du monde était proche. Sa voix était peu audible. "Ils ont tué Sam...ils l'ont dévoré ne laissant aucune trace. Aucune trace". Pauvre femme. Qui était Sam pour elle, un amis, son petit-fils, son chien? Qu'importe. Les corps calcinés dansent encore devant mes yeux. Oui calciné. Comme ci leur mort ne suffisait pas il fallait en plus les réduire en cendre histoire de faire partir au plus vite certains cadavres qui devenait trop écoeurant pour les citoyens. On dit que la ville sent le souffle de l'enfer. Les démons envahissent l'amérique. Pour ma part je n'en ai pas encore rencontré ou du moins je pense pouvoirs les repérer. La B.R.I.S est un sacré cugé m'a-t-on dit et au vu des événements je suis plutôt satisfait de pouvoir apporter mon aide. On verra bien.


ps: C'est l'anniversaire de maman demain. Appelle la. Ca lui fera plaisir.

Ton fils D.
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