Sujet: Re: I can't see you... but i can feel you... Jeu 2 Sep - 14:22
Once upon a time...
(c) Datura
Un simple mouvement avait suffi. Elle l'avait senti glisser sur la table jusqu'à se dérober, se laissant aller à sa chute, avant de se briser dès son premier contact avec le sol carrelé de la cuisine. Elle eut tout le loisir d'entendre la course de chaque bris de verre, jusqu'à sentir l'un des éclats contre son pied nu. Elle n'osait faire un pas. Elle se baissa lentement, tendant sa main droite en direction du débrit égaré, qu'elle pu enfin caresser du bout des doigts. Ayant perçu sa taille et son emplacement exact, elle l'emprisonna fermement, sans doute plus qu'il ne le fallait. Ses traits se contractèrent en une grimace douloureuse, bien que fugace, tandis qu'elle ressentait la morsure du verre qui s'enfonçait dans sa chair. D'un brusque mouvement, elle le libéra de son emprise. Il fut le premier à se faire entendre, à l'issue de cette seconde chute. Puis suivirent deux gouttes d'un liquide chaud et épais. L'une après l'autre, prenant naissance au sortir de sa peau pour mourir en s'écrasant sur le sol glacé. Deux petites tâches rouges, si proches l'une de l'autre qu'elles semblaient n'en former qu'une. Elle porta son pouce meurtri à ses lèvres. Déjà elle entendait le pas précipité de Safia. Imaginait son expression d'inquiétude face à la scène qu'elle découvrait tout juste. Briseis se contenta de lui offrir un sourire, accompagné de paroles rassurantes. Elle sentit que la jeune femme attrapait ses mains, la guidant à travers les débrits coupants. Bien qu'elle soit rémunérée pour s'occuper de la violoniste, elle se montrait toujours à son égard d'une étonnante sollicitude. Était-ce de l'affection, ou une simple conscience professionnelle? Elle n'en savait rien. Tout ceci était inutile. Elle ne craignait pas de saigner, bien qu'elle en détestat l'odeur plus que n'importe quelle autre. Cette senteur pestilentielle et tenace à la fois, présente dans ses pires cauchemars et rappel des fantômes de son passé. Mais jamais elle n'en avait perçu la couleur, qui rappelait celle, flamboyante, de sa chevelure. Jamais elle n'avait vu.
Elle était née dans le noir.
Ce n'était que le jour où elle naquit que fut diagnostiquée sa cécité. Elle ne s'en était plainte. Ce qu'elle ignorait ne constituait nul manque à ses yeux, et elle ne pouvait espérer de changement à son infortunée situation. Condamnée aux ténèbres perpétuelles, seule la musique fut une échappatoire suffisante pour lui permettre de le supporter avec le courage nécessaire. De ceux qui lui avait donné la vie, seuls des souvenirs demeuraient. Des sons perçus. Des voix, des rires. Des pas. Quelques impressions, vagues ombres habitant sa mémoire. Nul souvenir précis, à son plus grand regret. Rien d'autre que ce que son jeune esprit de l'époque avait pu enregistrer. Des échos, des odeurs. Quelques objets qui lui avaient été transmis. Le fait le plus marquant, le premier dont elle se rappelait réellement. Cette nuit où le Mal était entré chez elle. Ni vampires, ni loups garous, ni monstre ou esprit surnaturel d'aucune sorte. Mais des hommes. Simplement des hommes. Qui ils étaient, d'où ils venaient, elle ne le saurait sans doute jamais. Un cambriolage dont l'issue avait été fatale, selon l'enquête de police. Peu lui importait. Cette nuit là, elle avait tout perdu. Ses parents, son frère aîné. Assassinés. Elle seule avait survécue, dissimulée dans un placard de sa chambre. Elle avait été trouvée là, prostrée. Personne n'avait compris. Elle avait sept ans.
Sans doute n'y avait-il rien à comprendre. Elle n'était qu'une enfant égarée, rapidement confiée à une tante éloignée vivant dans le New Jersey. L'éloigner de Saint Louis semblait être à l'époque, la meilleure chose à faire. Cette enfant n'était plus que le symbole d'une tragédie, une horreur et, si tous en parlaient avec ce mélange d'aversion et d'avidité qui caractérise les réactions du public lors de ce type de fait divers, nul ne désirait en voir chaque jour la victime. Là-bas, elle aurait tout le loisir d'être autre chose. Et elle le fut. Autrefois sociable et gaie, elle n'était plus qu'une ombre, formant à l'aide les livres dont elle se nourrissait, un rempart la séparant du reste du monde, qu'elle rejetait sans équivoque. Les sourires et les joies avaient fait place aux larmes et aux cris peuplant ses pensées, ainsi que ses cauchemars. Devant sa difficulté à se lier aux autres, sa tutrice prit la décision certes difficile, mais nécessaire aux vues des circonstances, de déscolariser l'enfant, afin de lui offrir une chance de grandir et de s'épanouir. Mais combien d'heures passait-elle, assise sur cette balançoire au fond du jardin, l'esprit naviguant vers des eaux inconnues, tandis que son enveloppe charnelle demeurait immobile! Les vagues tendresses procurées ne pouvaient lui infliger que de la peine, alors qu'elle les comparait invariablement à celles de jadis. Seule la caresse des rayons solaires constituait pour elle un réconfort, bien que maigre. Une alarme, venant soudain à lui rappeler que la vie coulait dans ses veines, et qu'un jour, proche sans doute, il lui faudrait enterrer les cadavres de son passé. De là dépendrait le reste de son existence. Elle sut un jour qu'elle ne pourrait plus longtemps se contenter de sentir le temps défiler autour d'elle, tandis qu'elle évoluait au ralenti. Les roses faneraient, au même titre que sa prime jeunesse. Elle ne devait plus uniquement se contenter de percevoir la défiler vie autour d'elle, mais sortir de la forteresse où elle s'était emmurée, pour s'y mêler, à nouveau.
Cela commença par un cri. Le cri libérateur, son que seul peut produire le frottement de deux cordes l'une contre l'autre. Un mouvement de quelques secondes, exprimant ouvertement cette profonde agonie. Ce n'était que par le mouvement de l'archet qu'elle parvenait à libérer tout ce que pouvait contenir sa pauvre âme désolée, puis, peu à peu, à reprendre vie. Rapidement fut prise la décision de l'inscrire au conservatoire, où elle aurait pleinement le loisir de pratiquer cette musique qu'elle aimait tant. Elle ne pouvait contempler l'instrument, mais elle avait trouvé une autre manière de l'apprivoiser, afin qu'il se laisse manier à sa guise. Son agilité en devenait surprenante, mais sa musique l'était plus encore, ces sons qu'elle parvenait à tirer de l'objet qui se soumettait à l'habileté surprenante de ses doigts fins. Elle devait se passer de la vue, mais son toucher, ainsi que son ouïe en étaient amplifiés. Elle n'avait jamais cessé de jouer, chaque jour de sa vie, et ne cesserait probablement jamais.
Ce fut ce vers quoi elle se tourna, après le départ de Safia. Cet instrument dont elle chérissait chaque corde. Et elle jouait, vouée corps et âme. Sans doute aurait-elle pu vivre une grande carrière, sur le devant de la scène après ses études à Julliard. Mais elle était retournée à Saint Louis, semblant au grand désarroi de ceux qui l'avaient entourée, s'enfermer dans un univers où elle ne pourrait connaître que les cours de musiques octroyés à des élèves plus ou moins talentueux, et les petites salles de concert anonymes. Mais quelle importance, à ses yeux! Elle devait être là. Là où tout avait commencé. Là où tout finirait. À jamais elle appartenait à cette ville. On ne l'observait plus comme un objet de curiosité. Elle l'avait tout d'abord été auprès de ceux qui l'avaient autrefois connue. Puis, les choses avaient repris leur cours habituel, et elle n'était plus regardée que comme une jeune femme qu'il était agréable de rencontrer. Jamais elle ne parlait d'elle, si bien qu'il semblait difficile de la connaître. Et pourtant, elle savait se montrer serviable et ne refusait jamais un sourire. Ils lui étaient plus faciles à donner que des liens d'attachement durables. Depuis trop longtemps elle s'était emmurée dans la solitude pour pouvoir créer une brèche si aisément. Elle évoluait au centre de cette bulle qu'elle s'était créée, des années plus tôt. Elle sortait peu, et bien peu de paroles sortaient de sa bouche autres que celles qu'elle pouvait juger nécessaires. Elle souhaitait visiblement mener son existence dans le calme et la solitude. Elle savait pourtant, ce qui se trouvait au sein de cette ville. Oui, comme tous depuis huit ans, elle en était consciente. Partout, les opinions fusaient, entre ceux qui haïssaient, et d'autres qui désiraient leur présence, irrésistiblement attirés par le danger qu'ils pouvaient représenter. Voilà les nouveaux monstres de foire. Une imagerie de créatures qui, depuis la nuit des temps, étaient passées pour légendaires. Puis, d'un coup, d'un seul, elles étaient devenues réalité. Elle ne pouvait les voir, uniquement mesurer ce qu'elles représentaient pour le genre humain. Mais elle n'avait pas peur. Jamais la crainte n'avait évité le danger. Elle n'avait cessé ses promenades nocturnes, choisissant cependant des endroits relativement sûrs, et prenant garde aux mauvaises rencontres qu'elle aurait pu faire. Rien en effet n'aurait pu la dissuader d'entendre la fraîcheur de la nuit caresser les feuillages, de sentir l'éclat des astres nocturnes, ou les imaginer. Elle évoluait ainsi dans l'obscurité, longue silhouette, si pâle que l'on aurait pu s'attendre à percevoir derrière la barrière de ses lèvres rosées, de longues canines. Et pourtant, il n'en était rien. La finesse de ses traits la rendait agréable à regarder, ses yeux saphirs et sa chevelure ardente davantage encore. Elle avait le charme de ceux qui ne savent apprécier l'attraction que peut exercer leur aspect physique, car jamais elle n'aurait la possibilité de contempler son reflet.
Parmi eux, elle n'était rien. Une humaine, sans arme, ni capacité quelconque, ni force, que la Nature avait privé de la vue. Sans doute était-elle destinée à ne pas survivre bien longtemps. Et pourtant, déjà, elle avait survécu. Et elle savait. Elle les voyait, ces hommes qui, ne supportant leur destitution au profit d'autres races, en venaient jusqu'à condamner leur existence sur Terre. Ces intrus, ces abominations, n'étaient après tout, que des monstres sanguinaires. Elle n'était plus dupe. Les monstres qu'elle avait connu étaient humains. Le monde était plongé dans les ténèbres et l'on en venait à oublier celles qui y régnaient autrefois. Ces ombres avec lesquelles elle vivait chaque jour depuis l'enfance, compagnes d'une vie. Il s'agissait d'une partie d'elle. Elle ne la craignait pas.
Sujet: Re: I can't see you... but i can feel you... Sam 4 Sep - 14:47
Je pense que ma fiche est TERMINEE
Par contre je m'excuse, d'une part parce que ce n'est vraiment pas long (j'ai un peu de mal en présentation^^), d'autre part parce que, allez savoir pourquoi, mon correcteur d'orthographe ne fonctionne pas. Je me suis relue, mais il est possible que quelques fautes aient échappé à mon attention
▌A débarqué le : 21/07/2010 ▌Parchemins : 4682 ▌Quantité de sang disponible : 32115 ▌Age du personnage : Dans les 660 ans, je ne les compte plus ! ▌Rang : Chef du clan Blackstone. ▌Job : Chasseur à mes heures perdues. ▌Citation : Sanguinaire, comme toujours.
▌A débarqué le : 21/07/2010 ▌Parchemins : 4682 ▌Quantité de sang disponible : 32115 ▌Age du personnage : Dans les 660 ans, je ne les compte plus ! ▌Rang : Chef du clan Blackstone. ▌Job : Chasseur à mes heures perdues. ▌Citation : Sanguinaire, comme toujours.
Sujet: Re: I can't see you... but i can feel you... Sam 4 Sep - 16:10
Bienvenue Je plussoie Andrea, pour la musique du moins parce que je n'ai pas encore eu le temps de lire ta fiche, mais je ne doute pas de la qualité après tous ces compliments
Sujet: Re: I can't see you... but i can feel you... Sam 4 Sep - 22:44
Bienvenue miss ! Je n'ai pas encore lu ta fiche mais vu les commentaires sur cette dernière, ça ne saurait tarder ! Ton personnage me semble très intéressant. Amuse toi bien parmi nous !
Sujet: Re: I can't see you... but i can feel you... Dim 5 Sep - 8:16
Isleen McKeller a écrit:
Bienvenue miss ! Je n'ai pas encore lu ta fiche mais vu les commentaires sur cette dernière, ça ne saurait tarder ! Ton personnage me semble très intéressant. Amuse toi bien parmi nous !
Que dire de plus ? ^^
Bravo pour ta validation, et à bientôt sur le forum