Belle blonde aux formes généreuses, Freyja est l'archétype de la beauté suédoise. Ses yeux glacés vous ensorcellent, ses cheveux d'or vous éblouissent et sa peau de pêche vous achève. Consciente de ses charmes, la belle en joue, en use et en abuse. Elle n'hésite pas à mettre ses arguments en valeur et passe ainsi énormément de temps devant son dressing lorsque vient le temps de sortir. Elle aime porter des vêtements près du corps, mais pas forcément vulgaires. En effet, elle préfère cacher et appâter plutôt que de tout dévoiler. Aussi cette robe blanche, longue et élégante, bustier qui la met délicatement en valeur est de loin sa préférée. Mais elle ne dédaigne pas pour autant un simple short en jean et un teeshirt ordinaire. Néanmoins tout comme ses compagnes, elle aime les vêtements élégants et bien coupés et possède un sens aigu de la mode et du style. Jamais vous ne la verrez sans ses escarpins aux talons vertigineux. Et surtout elle porte une attention particulière à la lingerie, qui vire parfois à l'obsession. C'est bien la lingerie qui prend la moitié de son dressing et elle possède un ensemble pour chaque occasion, et le diable seul sait qu'elles sont nombreuses.

Délurée, c'est le premier mot qui vient à l'esprit de quiconque voit Freyja. En effet, cette belle blonde qui chante joyeusement "Do you do you Saint Tropez" debout sur une table peut paraître pour le moins... eh bien la caricature même de la blonde, une vraie Barbie. Et elle en joue. Pour qu'on ne se méfie pas d'elle. Tout comme ses compagnes qui ont pris le parti de jouer les charmantes bimbos, elle sait qu'il vaut mieux être méprisée et sous estimée que crainte. Ses différentes morts le lui ont bien appris et elle est plus que prudente à ce sujet. Brûlée vive ou noyée, elle a testé et n'approuve pas, merci bien. Aussi derrière ses apparences légères se cache une femme avide de pouvoir et prête à tout pour l'obtenir. Attachée seulement à ses amies de toujours et à son familier, elle ne montre son véritable visage qu'à eux. Plus féroce qu'une lionne, elle tuera sans hésiter quiconque osera s'en prendre aux siens. D'un naturel plutôt volcanique et emporté, elle a le sang chaud et quiconque provoque sa colère doit s'attendre à en subir les conséquences tôt ou tard. Malgré son visage d'ange, elle peut se montrer aussi cruelle et inventive niveau torture. C'est d'ailleurs l'un de ses passe-temps favori, juste après la mise à mort qui lui permet d'augmenter ses pouvoirs et ceux de ses soeurs, d'offrir un peu plus de vie à leur séduisant et dangereux familier, Stefan.

Un râle de pur plaisir s'échappe de ma gorge alors que je retombe sur le matelas, épuisée. Je pouffe de rire alors que les lèvres de mon familier effleurent ma nuque. Isis et Aphrodite reposent à côté de moi, tout aussi épuisées. Il est vrai que notre Stefan est d'une rare vigueur et que nous peinons à le satisfaire, même à trois. Blottie contre mes compagnes, je frissonne sous le regard brûlant de cet homme. Plus le temps passe, plus il gagne en puissance. Il a toujours été ainsi. Puissant. De son vivant il l'était mais il était mortel et donc moins effrayant en un sens. A présent il n'est qu'un esprit gagnant en substance en se nourrissant de notre énergie et des sacrifices que nous lui apportons. Et il est affamé dans tous les sens du terme. Encore plus lorsqu'il vient de recevoir sa dose de vie. Le corps de l'homme que nous lui avons sacrifé ce soir repose dans un coin, son sang macule la table en pierre gravée de signes millénaires. Il s'est nourri de sa vie, de son âme, l'a absorbée complètement, comme d'habitude. Ses yeux nous couvent avec une adoration presque palpable, ses mains viennent nous effleurer et à nouveau nos soupirs s'élèvent. La nuit va être longue.

Je suis née ainsi que mes compagnes un 31 octobre au XIIème siècle, en l'année 1290. Notre mère nous mis au monde toutes les trois, nous étions soeurs. De parfaites triplées qui grandirent ensemble à la campagne. Filles de paysans, nous menions une existence difficile et rude. Malgré tout j'étais heureuse, car elles étaient à mes côtés, mes soeurs, mes miroirs. Exactement semblables physiquement, nous l'étions aussi par l'esprit bien que chacune commença à développer son caractère propre. Bien vite il apparût que nous nous suffisions à nous-même. Rien ni personne ne devait s'immiscer dans notre relation privilégiée et il nous semblait parfois que nous n'avions aucunement besoin de mots pour nous comprendre. Tout était si évident, si facile ! Nous grandîmes, toujours aussi semblables, d'une beauté somme tout relative et bien ordinaire, rien qui puisse provoquer l'envie. Mais notre esprit, oh oui notre esprit était bien au-dessus de nos parents ! Enfants nous étions éveillées, curieuses de tout et observatrices. Les forces de la nature nous fascinaient et les voir à l'oeuvre nous remplissait d'admiration. Je me souviens d'orages violents qui, loin de nous effrayer, nous faisaient pousser des cris de joie et notre mère devait déployer des trésors d'ingéniosité pour que nous n'allions pas courir dehors. A l'adolescence, tout changea. Nos pouvoirs se manifestèrent alors pour la toute première fois. Rapidement je me rendis compte que si je n'avais aucun contrôle sur mon pouvoir, il en allait de même pour mes compagnes. Si mon chant parvenait parfois à séduire, cela ne fonctionnait pas à tous les coups. Mon pouvoir était bien moins puissant qu'à présent et il ne parvenait qu'à mettre ceux qui l'entendait dans de bonnes dispositions. Rien de plus. Cette faiblesse fut notre perte. La chasse aux sorcières était monnaie courante. Et nous étions trois soeurs imprudentes, ne cachant notre fascination pour les phénomènes naturels en aucune manière, avides d'apprendre encore et encore et, erreur ultime, nous adonnant à la médecine par les plantes sans nous cacher. On nous accusa de tous les maux, d'inceste, de pacte avec le diable et que sais-je. On nous tortura, on nous soumit à la question. Et on nous conduisit au bûcher. Entravées, les flammes léchant déjà nos pieds, nous hurlâmes de tout notre coeur alors que la morsure du feu nous faisait souffrir à en perdre la raison. D'une seule et même voix nous fîmes le serment de nous retrouver quoi qu'il arrive et en un ultime pied de nez à ces maudits inquisiteurs, nous priâmes le diable et les esprits de nous accorder de revenir et nous jurâmes de ne plus être innocentes, de faire tout ce qui serait en notre pouvoir pour devenir puissantes, craintes et respectées.

Nous revînmes à la vie lors de la Renaissance, à la belle Venise. Cette fois nous ne naquîmes pas sœurs mais cousines. Filles de trois sœurs, nous vînmes au monde un 31 octobre, encore une fois. Nos souvenirs étaient intacts et je ne vous cache pas qu’il a été plus que difficile de grandir dans un corps d’enfant avec un esprit de femme. J’ai cru perdre l’esprit plus d’une fois tant cela m’était insupportable. Mais mes sœurs étaient là. Nous n’étions plus reliées par le sang, mais par l’esprit et le cœur plus sûrement qu’autre chose. Nous avions défié la mort et nous nous étions retrouvées. Nos pouvoirs aussi étaient toujours là, nos connaissances également. Non plus filles de paysans, nous étions à présent filles de notables riches et bien installés. Nous reçûmes alors une solide éducation qui nous ravit, étanchant un peu notre soif de connaissances. Nous apprîmes le latin, la littérature, la musique, chose qui me ravit à un point inimaginable. À l’instar de mes compagnes, je pouvais développer mon pouvoir en toute impunité. Le temps passa et nous devînmes des jeunes femmes courtisées par les notables et nobles environnants. C’est ainsi que nous rencontrâmes Stefan. Il était un de ces nobles excentriques dont on entendait parfois parler et qui alimentait les ragots des servantes. On le disait libertin, charmeur et presque toujours en voyage. On disait même qu’il avait fait le tour du monde. Rien de mieux pour exciter notre curiosité et lorsqu’il nous rendit visite, nous fûmes plus surprises que prévu. Stefan était comme nous. Il était un sorcier et un sorcier puissant. Il lut en nous aussi facilement qu’en un livre ouvert et nous offrit alors son savoir, sa protection. Oh bien entendu cela n’était pas innocent. Il parvenait ainsi à contrôler trois sorcières et à s’attirer leur loyauté. C’était fort bien calculé et nous tombâmes évidemment dans le piège. Nous nous prîmes à l’aimer, toutes les trois. Et durant dix années il nous aima toutes les trois, nous entraîna dans un univers de débauche, nous enseigna la magie blanche mais aussi la magie noire, nous aida à maîtriser nos pouvoirs. Il était plus qu’intéressé par notre réincarnation et nous pressait sans cesse de questions, faisant le rapprochement avec des cas d’esprits n’ayant pas trouvé le repos mais ne s’expliquant pas comment nous avions pu renaître à nouveau. Notre chute vint d’une femme dont notre maître, notre professeur, tomba éperdument amoureux. Bianca était son nom. Elle était d’une beauté si pure et si innocente qu’elle ressemblait à un ange. Terriblement pieuse et fervente chrétienne, ce fut elle qui nous dénonça aux autorités religieuses peu après son mariage avec Stefan. Cet imprudent avait eu la folie de lui confier ce qu’il était, ce que nous étions et de lui faire une démonstration de ses pouvoirs, pensant que son amour lui ferait accepter cela. Mais bien qu’il l’eût connue docile, sa foi était plus forte et après un procès qui fit grand bruit, nous fûmes condamnés à mort. Notre maître fut pendu. Quant à mes sœurs et moi, nous fûmes noyées, jetées par-dessus bord d’un bateau, nos corps lestés de pierres solidement attachées à nos pieds. Nous mourûmes une seconde fois, nous promettant à nouveau de nous retrouver, utilisant tout notre pouvoir pour sceller ce serment.

Cela nous mène à ces dernières années. Notre réincarnation pris pourtant davantage de temps cette fois-là. Nous naquîmes toutes dans des pays différents. A moi la Suède, à Aphrodite la Grèce et à Isis l’Egypte. Enfants, nous pleurions d’être séparées et rien ne pouvait apaiser notre peine. Nous fûmes toutes trois des petites filles solitaires et désemparées. Pourtant un jour, nous reçûmes tour à tour la visite d’un esprit. Je me souviendrais toujours de cette apparition. J’avais cinq ans et blottie au fond de mon lit, je vis mon ancien maître, mon bien-aimé Stefan. Il n’avait pas trouvé la paix et s’il n’avait pas eu la chance de se réincarner comme nous, il avait au fil des siècles absorbé la force de bon nombre de sorcières afin d’obtenir suffisamment de force pour ce genre de tour : apparaître aux yeux des vivants et des non-médiums. Il me rassura, embrassa mes joues et me révéla que mes sœurs étaient vivantes et m’attendaient. Il m’enjoignit de prendre patience et d’attendre le moment opportun pour les rejoindre. Je devais grandir suffisamment pour que mes parents me laissent partir sans se douter de quoi que ce soit. En attendant je devais être une gentille petite fille et continuer à apprendre. Tous les soirs Stefan venait me retrouver quelques heures pour continuer à m’enseigner son savoir, comme il le faisait pour mes sœurs. Je jouais la comédie pour mes parents, devins une bonne élève et répondis en tous points à leurs attentes. Pour mes seize ans j’obtins d’aller à Paris… tout comme mes sœurs. Nous nous retrouvâmes enfin. Pour peu de temps certes mais cela nous permit de garder contact quoi qu’il arrive. Lorsque vint le temps, nous partîmes toutes pour la même université. Enfin nous étions réunies. Stefan ne nous quittait plus et nous nous mîmes très vite en tête de lui rendre sa puissance d’antan, chose qu’il nous souffla très certainement. Ce n’était pas aisé et bien qu’il puisa dans nos pouvoirs régulièrement, cela n’était pas assez pour lui permettre de se matérialiser définitivement. Cela durait tout au plus quelques heures et nous ressortions tous épuisés de ce tour.

C’est ainsi que nous prîmes la décision de sacrifier des humains pour que Stefan revienne définitivement parmi nous. Nous nous attaquâmes à un homme répugnant, facilement alléché par nos charmes et sa mise à mort fut facile, terriblement facile et dangereusement enivrante. Son énergie à peine absorbée que Stefan était là, terriblement beau et palpable, l’air si vivant que nous nous empressâmes d’aller l’embrasser, si heureuses de le retrouver et de pouvoir enfin le serrer dans nos bras. Depuis nous recommençons régulièrement l’opération. Nous choisissons nos victimes avec soin, des criminels, des fous, des drogués… ceux que la société rejette et dont nous nous servons en toute impunité. Stefan devient de plus en plus puissant, les sacrifices se font de plus en plus espacés. Lorsque nous avons sacrifié un médium alors la force de notre familier s’est faîte plus palpable, plus brûlante. Nous devons lui offrir davantage de victimes de ce genre. Nous sommes persuadées qu’un vampire, un loup et un sorcier lui permettraient de regagner complètement sa vie et ses pouvoirs. Mais il nous faut les choisir avec soin. Nous aimons notre nouvelle vie pleine de fête, de débauche. Mais notre bonheur ne sera complet que lorsque Stefan qui a maintenant un corps, aura retrouvé la complète maîtrise de ses pouvoirs. Tout au plus est il capable de communiquer avec nous par la pensée. Mais je n’ose imaginer ce qu’il se passera lorsqu’il sera à nouveau doté de sa puissance d’antan. Nous l’aimons et le craignons. Car s’il se fait aimant, il est aussi jaloux. Nous lui appartenons, c’est cela que disent ses yeux lorsque nous jouons avec d’autres hommes ou d’autres femmes. S’il accepte de nous voir avec quelques compagnes, il est beaucoup moins tolérant quand il s’agit de mâles. Mais il se contient, essaye de ne pas trop nous brider. Il nous enjoint d’être prudentes et nous jouons les ravissantes idiotes depuis que nous sommes arrivées à la Nouvelle-Orléans. Cet endroit regorge de magie et notre pouvoir grandit de jour en jour. Nous vivons dans cette grande maison, presque un manoir et l’on prétend que nous sommes des filles à papa un peu folles et stupides. Nous ne faisons rien pour les détromper, cela vaut mieux pour nous. Nous ne sommes pas invulnérables, après tout nous sommes mortes déjà deux fois. Et vu le nombre de créatures potentiellement dangereuses dans le coin, il vaut mieux continuer à passer pour des bimbos décérébrées aux mœurs légères… tout en continuant notre œuvre pour que notre maître retrouve sa gloire et sa puissance passée. Après cela, plus rien ne pourra nous arriver j’en suis persuadée.