« Mes premiers souvenirs remontent à ma huitième année, avant il n’y a qu’un immense trou noir qui me ronge de l’intérieur. Aucun détail ne s’en est jamais échappé. Rien. Un néant, un gouffre sans fin. J’ai ce que les médecins ont appelé une amnésie post-traumatique. En fait, ils ne savent pas vraiment puisque je ne sais pas ce qui m’est arrivé et que ce n’est pas la loque qui me sert de père qui va leur raconter. Il ne veut rien me dire et souvent, ça me rend fou. Je suis en droit de savoir ce qui m’a mis dans cet état, pourquoi je n’arrive pas à me souvenir de ma vie avant que mon père et moi nous quittions l’Irlande pour aller nous installer aux États Unis. A Saint Louis plus précisément. Mais il se contente de boire à s’en rendre malade, avachi sur le sofa de notre vieil appartement. Il me répète sans cesse que j’ai de la chance d’avoir oublié et que je devrais arrêter de lui poser toutes ces questions. Le passé ne peut être changé et pour lui, en connaître chaque détail est comme un poison qui te dévore de l’intérieur. Pourtant, il ne sait pas de quoi il parle. Il est persuadé que mon amnésie me protège mais elle ne fait que me hanter, tout comme il est hanté par ses souvenirs. A la différence que lui n’a pas oublié toute une partie de sa vie, il n’a pas oublié les êtres qui lui étaient cher. Je n’ai pas eu cette chance. J’ai même oublié ma propre mère, et je ne sais pas à quoi elle ressemblait, comment elle s’appelait ni de quelle façon elle s’occupait de moi. Il n’a amené aucune photo lorsqu’on est parti afin que je ne puisse pas retrouver ma mémoire, préférant que je l’oublie complètement plutôt que de me souvenir de sa mort. Je le hais pour ça, parce qu’il ne me laisse pas choisir, parce qu’il considère que je ne sais pas de quoi je parle, que je serais plus heureux dans mon ignorance. Mais c’est faux. Je ne peux pas aller de l’avant, ni cicatriser mes blessures, parce que je n’en connais pas la nature. Il a fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Tout ça parce qu’il a toujours été trop faible pour affronter la réalité et vivre avec le passé. De quel droit pense-t-il que je n’en suis pas capable ? A cause de lui, j'erre entre deux vies, et je n’ai jamais su où était ma place. C’est de là que viennent mon instabilité et ce caractère lunatique que tout le monde ne cesse de me reprocher. Mais je les emmerde, lui et tous les autres. C’est ma vie et j’en ferai ce que je veux. »
« - Pourquoi tu pleures ? » Une petite fille était assise sur les marches menant au pallier supérieur. Comme lui, elle venait de rentrer de l’école et son cartable était posé sur ses genoux. Intrigué, Khelliam la regardait sans pouvoir détacher ses yeux des perles salées qui scintillaient sur ses joues. Elle devait avoir le même âge que lui, huit ans peut-être un peu plus. Il n’aurait pas su le dire. Ce n’était pas vraiment ça qui attirait son attention, ni ses cheveux, couleur de miel. Non, il ne regardait que la peau pâle de la fillette, souillée par des larmes amères. Avait-il déjà pleuré lui aussi ? Il ne s’en souvenait pas. Penchant la tête sur le côté, il plissa les yeux, l’observant de son regard clair. « - Tu as mal ? » Elle secoua la tête lui faisant alors comprendre que le problème se trouvait ailleurs. Perplexe, il s’approcha afin de s’asseoir aux côtés de la petite fille. Pourtant, il n’esquissa pas le moindre geste pour la consoler. Il ne savait pas faire ce genre de choses. Caresser une joue, murmurer des paroles réconfortantes. Il ne se souvenait plus de ces gestes tendres qu’on avait pu avoir envers lui, alors comment aurait-il pu les reproduire ? Glissant sa main dans ses mèches châtains, il lui adressa un regard en coin alors que les pleurs de l’enfant avaient redoublé d’intensité. Quelque peu désemparé, il émit une dernière hypothèse. « - Tu es… triste ? » Elle sursauta et se tourna vers lui, le dardant de ses prunelles rougies, comme si c’était une évidence et ça en était certainement une pour n’importe qui d’autre. Mais pas pour Khelliam. Tout lui échappait, y compris sa propre existence.
Doucement les doigts de la petite fille se tendirent vers lui alors qu’elle posait sur lui un regard étonné. « - Tu n’as jamais été triste ? Tu n’as jamais pleuré ? » Surpris, il sursauta, ne comprenant pas vraiment pourquoi elle lui posait soudainement ce genre de questions alors qu’elle n’avait pas daigné répondre aux siennes. Du moins pas de vive voix. Elle ne lui avait rien expliqué et soudain, elle s’intéressait à sa présence. Les autres êtres humains étaient vraiment étranges, il ne parvenait pas à les comprendre. Fronçant les sourcils, il haussa mollement les épaules. « - Je ne sais pas. » Elle le dévisagea comme si il était une de ses bêtes curieuses dont on parle dans les livres et il se sentit soudain très mal à l’aise. Cependant au lieu de s’écarter et de le fuir comme il l’avait imaginé, elle s’accrocha vivement à son cou. Décidément les filles étaient vraiment incompréhensibles. Ne sachant pas ce qu’il devait faire exactement, il resta assis les bras ballant, la laissant sécher ses larmes sur son vieux sweat. Un air complètement extatique sur le visage, il n’esquissa pas le moindre geste, comme si il attendait qu’on vienne l’aider, qu’on lui dise de quelle façon toute autre personne aurait réagit. C’est ce moment là que choisit sa voisine, Mrs Weakles, pour ouvrir sa porte et l’appeler. « - Khelliam ! » Il se leva brusquement comme si il se sentait pris en faute alors qu’il savait, ou plutôt il pensait n’avoir rien fait de mal. La petite fille s’était levée, elle aussi, et elle l’embrassa vivement sur la joue alors qu’il se débattait comme si on l’avait attaqué. « - Hey ! Laisse-moi ! Laisse-moi ! » Il détala les marches afin de rejoindre l’appartement de Mrs Weakles, sous le regard effarée de la fillette.
Le cœur battant, il pénétra dans l'entrée en courant tandis que la vieille femme fermait la porte derrière lui. Se sentant en sûreté, il s’immobilisa à l’entrée du salon alors que Mrs Weakles braquait sur lui un regard inquisiteur. « - Tu es un peu précoce mon petit, tu t’intéresses déjà aux filles ? » Il ouvrit la bouche, presque indigné qu’elle puisse pensé ça alors qu’il n’avait rien fait. C’était elle ! Elle n’avait pas voulu lui dire pourquoi elle pleurait et ensuite elle s’était jeté sur lui, bien qu’il ne lui ai rien demandé. « - Non ! Beurk ! Les filles sont folles, je comprends jamais ce qu’elles veulent. Elles pleurent et te sautent dessus en même temps. Bizarre. Vraiment bizarre. » Le rire de la vieille femme interrompit soudainement la consternation du jeune garçon qui lui adressa un regard surpris. Qu’est ce qui pouvait être si drôle ? Décidément, tout le monde s’était passé le mot pour le plonger dans l’incompréhension la plus totale. Pourtant, Mrs Weakles le prit par les épaules l’entraînant doucement dans le salon où l’attendait le repas qu’elle lui avait préparé. « - Ne t’en fais pas, tu comprendras tout ça plus tard, mon garçon ». Il ne savait pas vraiment si il devait la croire, si il comprendrait un jour le monde qui l’entourait. Mais il en doutait. Même si la vieille femme s’était toujours gentiment occupée de lui, sans poser la moindre question. Si elle n’avait pas été là, tout aurait été bien plus compliqué, et il aurait sûrement du grandir bien plus vite. Un soutien quel qu’il soit était toujours salutaire, surtout quand son père buvait au point ne pas se réveiller avant les heures les plus tardives de la nuit.
« Je vis dans mon propre monde, avec mes propres règles. Et pourtant, je n’ai jamais réellement connu la solitude. A vrai dire, si je ne laisse pas n’importe qui empiéter dans mon jardin privé, je n’ai jamais été contre un peu de compagnie pour égayer mes soirées et rompre la monotonie du quotidien. Les gens peuvent réellement se montrer très distrayant à leurs heures perdues, bien que j’ai toujours eu cette difficulté à les comprendre, à comprendre leurs désirs, leurs vies. Comme décalé, j’ai souvent la sensation de les observer à travers un voile, de ne pas respirer le même air. Dès que j’ai pu, j’ai commencé à travailler dans un bar, en parallèle des études que j’avais commencé dans ce domaine. J’avais seize ans, j’étais jeune, con et terriblement libre et indépendant. Pour être honnête, je ne peux pas dire que, de ce côté là, ça ait réellement changé depuis. »
Un nuage de fumée s’échappa de ses lèvres alors qu’il entraînait le jeune homme dans l’escalier du vieux bâtiment. « - Tu habites seul ici ? » Khelliam ne se retourna pas vers lui, imperturbable, il scrutait l’obscurité, comme si il s’attendait à voir quelqu’un apparaître devant eux à tout moment. Ralentissant légèrement, il haussa les épaules, dans un geste indifférent. « - Tout dépend ce que tu entends par ‘seul’. » Intrigué, le jeune homme s’immobilisa un instant, mais l’insistance de Khelliam finit par le sortir de sa stupeur et l’encouragea à continuer son ascension. La nuit était déjà bien avancée et l’ensemble des appartements semblait plongé dans un sommeil profond, à peine interrompu par le bruit des pas des deux jeunes hommes dont la respiration haletante n’avait rien à voir avec l’effort fourni pour grimper les marches les séparant de l’endroit où ils se rendaient. Glissant un doigt dans le passant de la ceinture de son compagnon, Khell’ l’attira contre lui, l’obligeant ainsi à franchir soudainement les trois marches qui le menèrent sur le pallier. Le corps tendu par le désir, il captura ses lèvres avec avidité, lui arrachant un soupir de plaisir. Un sourire se dessina alors sur ses lèvres tandis qu’il lui faisait signe de le suivre, le laissant volontairement sur sa faim, bien que son propre corps lui intimait de continuer, encore et encore. Mais ce n’était pas le lieu, ils étaient presque arrivés, encore un peu de patience. « - Suis-moi. » Le jeune homme acquiesça sans un bruit alors qu’ils entraient dans l’appartement. Le salon ressemblait à un champ de bataille où bouteilles, vêtements et paquets de nourriture en tout genre cohabitaient sur le sol, offrant un spectacle des plus pittoresque auquel Khelliam n’accorda pas la moindre attention. Il avait l’habitude que son père pollue l’espace avec ses saloperies. Ce dernier se tourna d’ailleurs vers lui, le détaillant de son regard vitreux. « - C’est à cette heure-ci que tu rentres ? Non mais tu as vu l’heure ?! Khelliam, je te parle ! » Pourtant, son fils prenait un malin plaisir à l’ignorer, cherchant de quoi boire dans les placard de la cuisine, espérant que son père n’avait pas déjà tout siroté. « - T’étais où encore, hein ? » C’était une très bonne question, bien qu’il aurait du connaître la réponse depuis le temps.
QUELQUES HEURES PLUS TÔT
Les clients affluaient dans le bar, commandant toutes sortes de boissons avant de retourner au centre de la salle où l’ambiance atteignait son apogée. Khelliam les observait d’un œil distrait, préparant leurs commandes avec une habileté acquise avec l’habitude. Il commençait peu à peu à prendre le coup de main, étant vraiment fait pour ce genre de métier, lui qui aimait tant la nuit. Il s’y sentait dans son élément là où les personnes se fondaient dans un univers où tout était possible, en totale liberté. Cela ressemblait vraiment à la vie qu’il menait en tout temps, de jour comme de nuit. Aucune limite, sauf celle de son propre plaisir. Le seul endroit où il acceptait un minimum de règles c’était dans ce bar, lorsqu’il travaillait et ce n’était que parce que cela lui permettait de gagner de l’argent tout en étant plongé au milieu de la foule. Il avait ainsi l’occasion d’observer les gens qui venaient prendre du bon temps dans le bar afin de choisir la ou les personnes qu’il irait bien aborder après son service. Parfois, il n’avait même pas besoin d’attendre jusque là, on venait directement s’adresser à lui au comptoir. C’est ce qui s’était passé ce soir là alors qu’un jeune blond s’était appuyé sur le bar. « - Je te sers quoi ? » Il avait réfléchi comme si il avait été surpris par la question parce qu’il n’était pas vraiment venu pour qu’on lui serve à boire. « - un whisky, mais… » Khelliam braqua son regard perçant sur le jeune homme qui ne sembla que plus gêné. « - Mais ? » Il sembla hésité, évitant son regard inquisiteur avant de murmurer enfin, sa voix presque couverte par le bruit de la musique et des conversations. « - Je n’ai pas vraiment l’âge tu vois… » Un sourire amusé étira les lèvres de son interlocuteur alors qu’il se hissait sur le bar, lui faisant signe de s’écarter et de tourner sur lui-même, comme si il jaugeait la marchandise. Puis reprenant sa place, il lui tendit son verre en répliquant. « - Ca ira. Et puis, si tu veux tout savoir, je n’ai pas vraiment l’âge non plus. »
Le verre du jeune blond se vida alors peu à peu sous les yeux de Khelliam qui l’observait de temps à autre du coin de l’œil, intéressé par le regard brillant que ce dernier posait sur lui. Feignant de l’ignorer, il continua à répondre aux commandes, préparant cocktails et autres boissons en tout genre qui éveillaient les papilles de ses clients. Généralement, de son côté, il buvait raisonnablement, connaissant ses limites, sa tolérance à l’alcool, et il ne les franchissait que rarement, préférant amplement garder ses moyens et n’ayant pas besoin de se plonger dans un état léthargique pour agir à sa guise. D’ailleurs, il n’avait pas envie de rentrer sagement chez lui ce soir là. Pas avec le regard qu’il sentait posé sur lui, avec insistance et qui éveillait en lui des pensées loin d’être chastes et pures. Cependant, il n’aimait pas céder trop vite, il préférant jouer un peu avec sa proie et lui laisser croire qu’il ne s’intéressait pas forcément à lui. Dans tout son orgueil, il aimait se faire désirer, faire durer le plaisir, laisser monter le désir. Après tout, cela faisait parti du jeu. Se chercher, se repousser, se rapprocher pour mieux s’éloigner, et finalement revenir. Avec nonchalance, il déambulait derrière son comptoir, comme intouchable dans son propre univers. Et loin de s’en plaindre, le jeune homme sirotait tranquillement son verre, puis un second, ne quittant pas des yeux celui qui le lui remplissait dès qu’il lui faisait signe. Il était tenace et Khelliam aimait ça. Il n’aimait pas qu’on renonce trop vite, qu’on ait peur de foncer tête baissée. Pour lui la vie était faite pour être vécue à fond sinon autant se tirer une balle tout de suite. Tout, plutôt que de la gaspiller sans raison. Lorsque son service toucha à sa fin, il s’approcha du jeune homme, glissant son bras autour de sa taille alors qu’il lui murmurait. « - Tu veux qu’on aille dans un endroit plus… tranquille ? »
FIN DU FLASH BACK
Les bouteilles tintèrent entre les mains de Khelliam qui préparait un petit cocktail, sous le regard furibond de son père. Une fois l’opération terminée, il remplit une bouteille vide avec la boisson finement alcoolisée, au goût acidulé et sucré. Le jeune homme ne l’avait pas quitté des yeux, comme si il étudiait chacun de ses gestes en fumant une cigarette. Voyant que la boisson était prête, il s'étira longuement et suivit le jeune barman jusqu’à la porte de sa chambre devant laquelle il s’immobilisa soudainement. Ouvrant la bouche, il faillit questionner Khelliam lorsqu’il remarqua que le père s’était levé et les observait d’un air furibond. « - Qu’est ce que tu crois, petit con ?! Je ne vais pas te laisser faire n’importe quoi. Tu ne seras pas un de ses… » Il grimaça comme si il se refusait à prononcer le mot qui pourtant semblait évident pour tout le monde. Chancelant sur ses jambes, il montra le jeune blond du doigt. « - Fais le dégager de chez moi, immédiatement ! » Excédé, Khell’ pointa sa bouteille sans la direction de son ivrogne de père. « - Je paie plus souvent le loyer que toi, espèce d’enfoiré, alors je ramène qui je veux ici… » Gêné, le jeune homme se plaça devant lui, ne voulant pas déclencher une guerre familiale même si elle semblait être quotidienne et remonter à des années. « - Attends, pas la peine de se prendre la tête, je peux revenir plus tard si tu... » Khelliam le fusilla du regard, comme si son invité venait de proférer la pire des insultes. Il était méconnaissable et le jeune homme s’interrompit brutalement comme si il craignait que son interlocuteur ne lui saute à la gorge. Pourtant, il se contenta de lui répondre d’un ton sec et froid. « - Ne t’en mêle pas ! Sinon, tu te casses de suite et pas la peine de revenir, je n’ai pas de temps à perdre avec toi si tu comptes te mêler de ce qui ne te regarde pas… » Comment avait-il pu changer de comportement à ce point en si peu de temps ? Après tout il ne lui avait rien dit de spécial, ou rien de bien méchant en tout cas. Mais Khelliam était passé d’un état d’esprit à l’autre très rapidement. Impulsif, lunatique, colérique, caractériel. Autant de qualificatifs qui lui collait à la peau et qu’il ne niait pas. Simplement, il ne l’obligeait pas à rester, voilà tout. Mais contre toute attente, le jeune homme se replaça devant la porte de la chambre et satisfait, Khelliam l’entraîna avec lui à l’intérieur, changeant à nouveau de comportement pour se laisser à nouveau envahir par le désir.
Dans la chaleur de la pièce, les vêtements s’éparpillèrent sur le sol, dévoilant les corps des deux amants. Oubliant le monde extérieur, ils s’enfermèrent dans leur bulle, ignorant les cris du paternel qui émanaient toujours du salon. Dans un soupir de plaisir, Khelliam s’allongea sur le lit, laissant les doigts du jeune homme parcourir sa peau, épousant son corps svelte et finement musclé. A son tour, il découvrit le corps de son amant dont la beauté ne le laissait pas indifférent, bien qu’il ne l’avouerait sûrement pas même si on venait à le lui demander. Il gardait ça pour lui, bien caché dans ce coin reculé de son âme, que jamais personne n’atteignait. Au fond, si il était rarement seul, Khelliam ne s’attachait pas facilement aux autres, comme si quelqu’un chose le retenait, le mettait en garde sur les dangers de tels liens. En effet, pour quelqu’un aussi avide de liberté, cela pouvait ressembler à une entrave. L’esprit vide de toute question, il goûta la douce saveur de la peau de son amant, éveillant un désir brûlant sur le passage de sa langue avant de remonter lentement afin de cueillir ses lèvres. Doucement leurs corps alanguis se libérèrent de leurs dernières entraves, s’effleurèrent avant de s’embraser doucement au contact l’un de l’autre. Et alors que toute raison semblait s’être évaporée, aux portes du désir, de la passion, le jeune homme entrouvrit les lèvres afin de s’exprimer. Cependant, Khelliam posa un doigt sur ses lèvres, ne voulant pas qu’il brise la parfaite harmonie du moment. « - Chut…. » Le jeune homme se mordit la lèvre et acquiesça, le regard brillant. Il ne dirait plus rien, ne voulant pas s’attirer à nouveau les foudres du barman impétueux, préférant canaliser cette énergie dans une entreprise beaucoup plus agréable. Sans un mot, il se retourna, collant son dos contre le torse de ce dernier, laissant parler son corps à sa place alors qu’il s’offrait pleinement à son amant, sans aucune retenue.
Dernière édition par Khelliam S. Hennessy le Ven 30 Juil - 14:13, édité 1 fois
« Ma vie a soudain basculé, il y a trois ans déjà. Depuis, je ne suis plus le même, je ne le serais plus jamais. Pourtant, j’ai appris à me fondre dans ma nouvelle existence même si mes problèmes restent inchangés, je suis toujours animé par cette même obsession de découvrir ce qui se cache derrière mon amnésie. Même si je n’en parle que très peu, en particulier à mon père, je continue à traquer le moindre indice pouvant me permettre de reconstituer le puzzle et d’en savoir un peu plus sur ma famille, sur cette partie de ma vie dont je ne garde aucun souvenir. Ça me ronge, c’est étrange. Pourquoi est-ce que je me raccroche ainsi à mon passé alors que je ne fais plus réellement parti de ce monde, de cet univers ? Puisque je ne suis plus réellement… humain. Ma vie tourne toujours autour des mêmes centres d’intérêts, bien que mes jeux soient quelques peu différents à présent. Je ne suis plus cet adolescent qui se glissait avec témérité dans le monde de la nuit. Non, je n’en ai plus besoin puisque je suis un fils de la nuit, un fils de la lune et je me sens pleinement chez moi sous son rayonnement. Elle m’observe, m’accompagne et je sens son influence couler dans mes veines. Elle régit ma nature et elle seule peut avoir une telle emprise sur moi. Je ne peux lui échapper… chaque soir de pleine lune, je quitte mon corps humain pour celui d’un loup blanc dont le regard pâle est semblable au mien. J’ai été mordu par accident lors d’une fête, un soir de pleine lune. Je m’étais éloigné du feu de camp et j’ai croisé sa route. Par la suite, ce loup est devenu mon mentor et durant un an, je suis resté à ses côtés afin d’apprendre à vivre avec ma nouvelle nature. Cependant, je ne suis pas l’un de ses chiots serviles, je ne parviens pas à écouter comme un bon petit soldat. J’ai besoin de liberté, j’ai besoin de vivre sans qu’on ne me freine sans cesse. Avant je n’avais pas réellement de famille, à présent je n’ai pas de meute. Je ne me suis jamais vraiment senti à l’aise dans ce genre de hiérarchie. Je suis mon seul et unique maître. Indomptable. »
Une main attrapa le col de sa veste en cuir. « - Arrête tes conneries, bon sang ! » C’était un refrain à la mode en ce moment apparemment. Cependant, Khelliam y restait insensible. Pourquoi aurait-il du écouter tous ces sermons ? Il était libre, il n’avait aucun ordre à recevoir. Ni d’eux, ni de personne d’autre. Dans toute la fougue de sa jeunesse, il ne craignait pas la B.R.I.S et aveuglé par l’instinct du loup, il ne réalisait pas le danger qu’il pouvait représenter. Ou peut-être que ça ne l’intéressait même pas après tout. Ca ne le touchait pas directement, ni lui, ni une personne de son entourage. Alors ça ne l’atteignait sûrement pas. « - Lâche-moi… Ce n’est pas pour ça que je t’ai demandé de venir. » Sur ces mots, il s’alluma une cigarette, concentrant son attention sur la lueur rouge qui se forma peu à peu au bout de cette dernière. Le soupir de l’homme n’attira même pas son attention. Faisant mine de l’ignorer, il attendit qu’il lui donne l’information qu’il était venu chercher. Tout le reste ne l’intéressait pas. Surtout pas ces conversations stériles sur ses propres actions. Pourquoi ne voulaient-ils pas comprendre qu’il n’avait que faire de leur avis, de leurs conseils ? C’était soit disant pour son bien, pour le bien de tous. Mais il était le seul à pouvoir juger de ce qui était bien pour lui. Il était le seul maître de son destin et tant qu’ils n’auraient pas compris ça, il ne prendrait même pas la peine d’écouter leurs élucubrations.
« - Tu ne réalises pas, je pense. Cette fille est à l’hôpital… à cause de toi ! Mais à quoi tu pensais ? Pourquoi t’être tenu si près d’un lieu fréquenté, un soir de pleine lune. » Il commençait réellement à le fatiguer. Que voulait-il ? Qu’il pleurniche en répétant pitoyablement qu’il était désolé, qu’il se sentait coupable et qu’il ne pourrait plus jamais se regarder dans un miroir ? C’était ridicule. Il ne se sentait pas coupable, il n’était pas humain et il s’était fait à l’idée que sa nature pouvait s’avérer dangereuse. A partir de là, il avait accepté ce qu’il était et si cela causait quelques dégâts autour de lui, il en assumait pleinement les conséquences. La culpabilité ne servait à rien. Elle n’aidait personne, elle ne changeait pas le monde. Ce n’était que du vent. Nonchalamment, il porta la cigarette à ses lèvres afin de se délecter de sa saveur avant d’en rejeter la fumée vers le firmament. « - Ecoute, elle n’est pas morte ? Alors pourquoi tu insistes pour me saouler avec tout ça ? » Son interlocuteur fronça soudain les sourcils, comme si il ne pouvait pas croire ce qu’il venait d’entendre. Pourtant, Khelliam était parfaitement sérieux, cela ne faisait aucun doute. Il déambulait à présent dans la clairière, observant les lieux comme si il ne les avait jamais vu auparavant. Cependant, ce n’était pas le cas, au contraire. Il revenait régulièrement dans ce lieu, comme dans un sanctuaire. Quelque chose qu’il ne pouvait pas nommer l’attirait irrémédiablement vers cet endroit précis de la forêt. Parce que c’était ici que tout avait commencé. C’était là qu’il était né une seconde fois et une partie de lui y était également morte ce soir là. Il était devenu un loup, un lycan, délaissant son humanité, l’abandonnant en ce lieu.
Les pas de l’homme se rapprochèrent mais il ne se tourna pas vers lui, comme si il se fermait au dialogue. Tant qu’il ne lui aurait pas livré les informations qu’il attendait, il ne prendrait pas la peine de l’écouter, ce dernier perdait donc son temps si il pensait parvenir à le raisonner. D’autres avant lui avaient déjà essayer et ils s’étaient tous heurter à cette même réaction. Pourtant, il ne semblait pas encore lassé par ce petit jeu. « - Cette fois, oui, tu as eu de la chance, tu ne l’as pas tué. Mais la prochaine fois ? » Khelliam commençait à perdre patience. Pourquoi ne voulait-il pas comprendre qu’il se moquait éperdument de son discours moralisateur ? Si il pensait que ses mots allaient finir par ramener son humanité et sa prétendue compassion, il se fourrait le doigt dans l’œil et il allait droit vers une déception amère. Excédé, Khell’ l’attrapa par le col de sa veste, l’attirant vivement vers lui. « - Quand vas-tu comprendre que tu gaspilles inutilement ta salive ? Je me fiche de ce que tu penses, est-ce bien clair ? Je t’ai demandé un service, que j’ai payé d’avance, il me semble, pour te motiver un peu. Alors si tu ne me donnes pas immédiatement l’information que tu as trouvée, je te ferai regretter de m’avoir pris pour un con. » L’homme se débattit avec force afin de se libérer de son étreinte, ne se sentant pas à son avantage et il y avait de quoi. Khelliam accepta de le lâcher, lui laissant une chance de se rattraper et de lui dire ce qu’il attendait depuis qu’il avait reçu son appel. Ce dernier semblait reprendre ses esprits comme si la force du jeune loup garou l’avait quelque peu surpris. En effet, son corps finement musclé et encore jeune, tout comme son apparence angélique, dupait souvent ceux qui prenaient le risque de le juger hâtivement. Cette pensée lui arracha un sourire alors que son regard se faisait insistant. Son interlocuteur dû sentir qu’il ne devait pas continuer à abuser de sa patience car il lui répondit enfin. « - D’accord. Puisque tu ne t’intéresses qu’à ta petite personne, je vais te dire ce que tu veux savoir… J’ai découvert quelque chose… sur ta famille, Khelliam. » Il marqua une pause, comme si il cherchait ses mots alors que le jeune loup était soudain suspendu à ses lèvres. « - Tu n’étais pas fil unique. Tu avais une sœur… une sœur aînée, mais elle a disparu peu de temps avant que tu ne viennes vivre à Saint Louis. »
Les paroles de l’homme mirent un certain temps avant de faire leur chemin dans l’esprit de Khelliam. « - Quoi ? » Si c’était une blague, ça n’avait vraiment rien de drôle. Loin de là. Pourtant, le regard de son informateur lui laissait penser qu’il n’était pas en train de se jouer de lui. Après lui avoir laissé le temps d’encaisser le coup, il reprit doucement la parole, comme si il aurait préféré dire toute autre chose. « - Par contre, je ne peux te donner ni son âge, ni son prénom. Je n’ai rien trouvé à son sujet, rien d’autre que son existence. Il semblerait que toutes les données aient été volontairement effacées. J’ai eu du mal à trouver, ne serait-ce que le fait qu’elle ait existé. » Khelliam n’écoutait plus vraiment ce qu’on lui disait. Son cœur battait contre ses tempes, et ce son envahissait à présent son esprit au point d’en effacer tous les autres. Il ne pensait plus qu’à une seule chose. Son père. C’était lui qui avait effacé l’identité de sa sœur, il en était certain. Il avait fait disparaître jusqu’à son existence, comme si elle n’était rien. Jamais il ne pourrait lui pardonner une telle chose, c’était tout simplement immonde et il le lui ferait payer. Oui, il lui ferait regretter de pourrir la moindre parcelle de son passé. Peu à peu, la haine se déversa en lui tel un poison et pourtant elle ne parvenait pas à déloger la douleur qui lui déchirait le cœur. Pourquoi ? Pourquoi il ne parvenait pas à se souvenir d’elle ? « - KHELLIAM ! » Mais c’était trop tard, il courait déjà à travers les arbres, laissant le cri de l’homme derrière lui. Alors qu’il traversait la forêt avec agilité, s’épuisant volontairement, les larmes venaient souiller sa peau, embuant ses yeux de leur touché amer et salé. C’était douloureux, bien plus qu’il n’avait pu l’imaginer lorsqu’il avait vu les autres pleurer. Jamais il n’avait versé de telles larmes, si brûlantes qu’elles semblaient emporter avec elles une partie de son âme.
Fragment de journal
« A vrai dire, depuis quelques temps une nouvelle question me taraude. Peut-être parce que j’ai découvert, peu de temps après ma transformation, que ma lycanthropie n’était pas la seule capacité surnaturelle que je possédais. La question qui se pose alors semble couler de source… Etais-je comme ça avant ? Aurais-je pu ignorer durant tout ce temps que j’étais doté de cette capacité d’attraction ? Tout est possible. Pourtant, lorsque je l’ai découverte, cela n’avait rien d’une force silencieuse et discrète. Bien au contraire. Sous le coup de la colère, alors que je me lançais dans une nouvelle joute verbale avec ce qui me sert de paternel, la moitié des objets de la pièce s’est littéralement jetée sur moi. Depuis, je n’ai pas réussi à reproduire un tel phénomène. Du moins pas volontairement. A croire que le pouvoir brut et indompté reste bien plus puissant que le pouvoir contrôlé et volontairement dirigé. Au fond, même après m’être longuement entraîné, il me reste encore beaucoup de chose à apprendre, sur moi-même, et sur ce dont je suis capable. En attendant, mon inexpérience me rend instable et dont potentiellement incontrôlable lorsque l’attraction s’opère sans que je l’ai désirée. Bien sûr, c’est bien moins fréquent qu’auparavant, mais cela arrive encore, je dois l’avouer. Après tout, chaque capacité est à double tranchant. Elle peut à la fois être salvatrice et destructrice, à la fois un bien et un mal. Tout comme ma lycanthropie. Et lorsque l’on accepte cette évidence, on est prêt à accepter les conséquences de nos actes. A ce titre, je ne regrette jamais les miens. . »
▌A débarqué le : 21/07/2010 ▌Parchemins : 4682 ▌Quantité de sang disponible : 32110 ▌Age du personnage : Dans les 660 ans, je ne les compte plus ! ▌Rang : Chef du clan Blackstone. ▌Job : Chasseur à mes heures perdues. ▌Citation : Sanguinaire, comme toujours.
▌A débarqué le : 21/07/2010 ▌Parchemins : 4682 ▌Quantité de sang disponible : 32110 ▌Age du personnage : Dans les 660 ans, je ne les compte plus ! ▌Rang : Chef du clan Blackstone. ▌Job : Chasseur à mes heures perdues. ▌Citation : Sanguinaire, comme toujours.